CONDITION FEMMES NAZIES
DES FEMMES ALLEMANDES EN RÉSISTANCE CONTRE LE NAZISME
Adolf Hitler rencontre des filles allemandes après son entré au pouvoir
Il y a bien eu une autre Allemagne que celle du nazisme. Les Résistances ont regroupé tous ceux hommes et femmes qui, avec désespoir se sont opposés à la tyrannie suivant la définition de Willy Brandt, de son vrai nom Herbert Fram, lui-même résistant. Ces oppositions et ces résistances ont été précoces. Elles se sont développées dès 1933 dans des conditions dramatiques compte tenu de la violence de l'Etat. La Résistance allemande a dû affronter douze années de régime totalitaire. C'est long et il y a là de nombreux motifs de découragement, sans compter la sévérité de la répression. Enfin, à la différence des autres mouvements de résistance européens, la Résistance allemande n'a pu compter sur aucun appui extérieur. Si, contrairement aux Françaises, elles sont citoyennes à part entière depuis 1919 par l'obtention du droit de vote, le régime nazi les cantonne dans les trois (K): Kinder, Küche, Kirche (enfant, cuisine, église). Les femmes allemandes de bon sang sont sommées de devenir mères.
Des femmes résistent dès 1933
Liselotte Hermann 1906-1938
Toutes les Allemandes ne sont pas nazies. Nombreuses sont celles qui s'opposent au régime hitlérien et qui aident les exclus du régime et les persécutés. L'entraide, ce qu'on appelle la Résistance humanitaire, est un domaine où les femmes ont été particulièrement actives.
Les femmes de l'Association Saint-Raphaël de l'église catholique, autant que celles de la Bekennende Kirche, l'église confessante fondée par des pasteurs pour s'opposer à la persécution des juifs et préserver leur indépendance spirituelle et intellectuelle, ont aidé les juifs chrétiens en les cachant.
Le fait le plus connu sans doute, est cette manifestation retentissante d'épouses aryennes de Juifs à Berlin fin février 1943, parfois accompagnées de leurs enfants, qui eut pour résultat la libération de leurs maris et pères.
La résistance politique des femmes n'est pas forcément différente de celle des hommes si ce n'est qu'elles ont peut-être une capacité plus grande que les hommes à échapper aux poursuites de la Gestapo. La police, du moins au début, s'en méfie moins. Dans tous les domaines, l'action des femmes contre le nazisme a été réelle et précoce.
L'exemple de Liselotte Herrmann est significatif. Jeune étudiante communiste et jeune mère, elle proteste ouvertement contre la prise du pouvoir par Hitler, ce qui lui vaut son renvoi de l'université de Berlin. Elle s'installe alors dans le Wurtemberg et participe à différentes actions de résistance. Avec des amis, elle parvient à faire passer à l'étranger des informations sur le réarmement national-socialiste.
Elle est arrêtée en décembre 1935 et condamnée à mort avec deux de ses amis en été 1937. Elle est exécutée le 20 juin 1938 à la prison de Berlin-Plötzensee, malgré des protestations du monde extérieur. Elle est la première mère exécutée. Elle laisse derrière elle un petit garçon qui sera élevé par les parents de Liselotte.
Le régime ouvre alors des lieux spéciaux pour l'internement des femmes. Un premier camp de concentration est mis sur pied en 1933 à Moringen puis transféré à Lichtenburg en 1938. Le camp de Ravensbrück est ouvert en 1939, puis en 1941, d'autres camps se dotent de leur section de femmes: Auschwitz-Birkenau et Gross Rosen. Le célèbre Chant des Marais composé par des internés politiques du camp de concentration de Börgemoor, a été transmis en septembre 1939 grâce à vingt femmes de la ville de Düsseldorf, filles et épouses de déportés, qui avaient organisées un voyage au camp pour y voir leurs pères et maris.
Résistance en Allemagne pendant la guerre.
Libertas Schulze-Boysen 1913-1942
Pendant la guerre, une résistance plus typiquement féminine se développe du fait de la mobilisation des hommes. Chaque groupe, cercle et mouvement a compté de nombreuses femmes qui y ont fait un travail identique aux hommes: information, propagande, renseignement, entraide.
Tel est le cas du Cercle de Kreisau avec Freya von Moltke, de l'Orchestre Rouge au sein duquel les femmes des deux initiateurs, Mildred Harnack-Fish et Libertas Schulze-Boysen, mères de familles, ont payé de leur vie leur engagement.
Maria Terwiel, dont la mère est d'origine juive, a dû abandonner ses études. Secrétaire dans une entreprise textile, elle entre en contact avec le groupe du capitaine Schulze-Boysen et fait connaître le sermon de l'évêque de Munster, Clemens von Galen, qui condamne l'extermination des malades mentaux. Elle aide aussi les juifs en danger par l'obtention de passeports. Arrêtée, elle est exécutée le 5 août 1943.
Au sein du mouvement de La Rose Blanche, Sophie Scholl, 20 ans, jeune étudiante en philosophie, est tout autant impliquée dans l'action que l'ensemble du groupe qui rassemble son frère Hans, Alexandre Schorell, Christopher Probst et leur professeur Kurt Hüber. Elle sera exécutée en compagnie de son frère, le 22 février 1943.
Il ne faut pas oublier non plus, le rôle des épouses des conjurés de l'attentat du 20 juillet 1944 contre Hitler, et qui ont payé un lourd tribu à la répression. Environ 600 personnes, auteurs de la conjuration, familles, amis, ont été arrêtées et dont les enfants ont été soustraits de force à leurs parents.
Lutter malgré l'exil
Des femmes ont choisi l'exil pour poursuivre la lutte. De 1933 à 1939, 500 000 Allemands ont fui à l'étranger. Parmi eux, Dora Schaul, émigrée en France depuis 1934, est internée à Rieucros (Lozère) en octobre 1939 parce qu'elle est étrangère et communiste.
Elle tombe sous le coup de la législation d'exception mise en place par le gouvernement d'Edouard Daladier. Elle s'est mariée dans le camp avec Alfred Benjamin qui est incorporé dans un groupe de travailleurs étrangers.
Édouard Daladier 1884-1970
Elle réussit à s'évader en juillet 1942, et grâce au réseau clandestin allemand du Deutsch-Arbeit (Travail allemand), elle opère pour la Résistance au sein de la Deutsche-Feldpost (Poste allemande) installée dans une aile de l'École de Santé militaire à Lyon. À la fin de la guerre, elle repart s'installer définitivement en Allemagne son pays d'origine.
Hilde Meisel (alias Hilda Monte), d'Angleterre, tente d'organiser une résistance internationale contre le régime nazi dès l'arrivée d’Hitler au pouvoir en janvier 1933. Juive, elle connaît les risques qu'elle encourt. Par ses écrits, elle sensibilise grâce à la Ligue Internationale du combat socialiste, des amis politiques de différents pays, y compris en Allemagne. Elle publie un livre: The Unity of Europe.
Sous le pseudonyme de Hilda Monte (son vrai nom est Hilda Meisel), elle fait parvenir à ses amis politiques en Allemagne des publications et informations. Elle réussit à pénétrer en Allemagne et en Autriche. Elle est abattue le 17 avril 1945 par une patrouille SS sur le chemin la reconduisant en Suisse.
Anna Freud 1895-1982
Anna Freud, fille de Sigmund Freud et elle-même psychanaliste, est réfugiée à Londres. Pour manifester sa reconnaissance, elle ouvre en octobre 1940, peu après les premiers bombardements, les Hampstead nurseries, foyers d'asile où sont accueillis les enfants sinistrés de la guerre.
Selon les rapports de la Gestapo, la participation globale des femmes à la Résistance aurait été de 15%. Si elles ont été une minorité, leur résistance est synonyme d'actes d'héroïsme contre le régime de la terreur, allant souvent jusqu'au sacrifice suprême.
Les formes de résistance ont été multiples: désobéissance civile, résistance humanitaire, résistance religieuse ou politique. Les résistantes allemandes et les résistants allemands ont contribué à reconstruire une autre Allemagne.
Käthe Niederkirchner 1909-1944
Né à Berlin, Käthe Niederkirchner était la fille d'un tuyauteur et communiste officielle des syndicats, Michael Niederkirchner. Elle a appris le métier de tailleur. En 1925, elle rejoint la Jeunesse communiste de la Fédération et en 1929 le Parti communiste allemand (KPD). En 1933, elle émigre à l'Union soviétique avec sa famille et a continué à travailler comme tailleur tout en fréquentant des cours de plusieurs études. Son frère aîné Paul a été arrêté par les services secrets soviétiques en 1939 et ont péri dans Boutyrka prison à Moscou. Après l'invasion allemande de l'Union soviétique, Käthe Niederkirchner volontaire pour l'action en Allemagne. Le 7 octobre, 1943, Wilhelm Pieck et le fils-frère, Theodor hiver, parachutés d'un avion soviétique, l'atterrissage en Pologne. Ils étaient censés entrer en contact avec les communistes à Berlin, mais ont été découverts sur le chemin de la ville. Theodor hiver a été exécuté par un peloton d'exécution dans le camp de concentration de Sachsenhausen. Käthe Niederkirchner a été exécuté par un peloton d'exécution dans le camp de concentration de Ravensbrück dans la nuit du 27-28 septembre 1944.
RÉSISTANCE ALLEMANDE AU NAZISME
la résistance intérieur
La résistance allemande au nazisme (1933-1945), longtemps méconnue hors d'Allemagne, s'est manifestée sous diverses formes, en provenance de tous les milieux politiques, sociaux et confessionnels, quoique les communistes aient organisé les groupes de résistance active les plus importants.
On distingue plusieurs formes de résistance au nazisme à l'intérieur de l'Allemagne même et des territoires annexés. Ses éléments les plus connus, bien que d'importance numérique très différentes, sont l'organisation communiste Orchestre rouge, le groupe d'étudiants chrétiens de La Rose blanche à Munich, ou le regroupement très informel des groupes de la Rose blanche de Hambourg, et la résistance militaire.
Hermann Goering, Martin Bormann et Bruno Loerzer dans les décombres de la salle de conférence de la Wolfsschanze, à la suite de l'attentat du 20 juillet 1944 contre Hitler.
Bruno Loerzer 1891-1960
Phénomène de masse
Les statistiques de l'appareil répressif nazi, en particulier de la Gestapo et des divers tribunaux, donnent une idée de l'ampleur de la résistance allemande au nazisme :
De 1933 à 1939, 225 000 personnes sont condamnées pour motifs politiques à des peines de prison plus ou moins longues et 1 000 000 d'Allemands et d'Allemandes sont envoyés dans les camps de concentration pour les mêmes raisons.
Pour la seule année 1933, le journaliste Curt Bley compte 100 000 personnes ayant exercé une activité antinazie réelle.
Au cours de l'année 1941, 11 405 opposants de gauche sont arrêtés par la Gestapo.
En 1944, environ 500 000 personnes sont arrêtées, dont une forte proportion d'étrangers.
De 1933 à 1945, 32 500 personnes sont condamnées à mort et exécutées, la plupart du temps pour motifs politiques.
Pour la seule période allant du 30 janvier 1933 au printemps 1936, 1 359 personnes sont assassinées par des agents du régime nazi.
Vers 1935-1936, la Gestapo estime qu'il existe 5 708 centres clandestins diffusant des tracts, affiches et brochures.
En 1936, elle saisit 1 643 200 tracts du Parti socialiste (SPD) et du Parti communiste (KPD), et encore 927 430 l'année suivante.
Cependant, jamais la résistance allemande n'a pu avoir un impact suffisant pour déstabiliser à elle seule le régime nazi.
Elle a en revanche réussi à influencer l'opinion, à assister les troupes alliées (en particulier les troupes soviétiques), à affaiblir l'appareil de la Gestapo et du NSDAP, à organiser des grèves dures, à assassiner des cadres militaires et politiques nazis et à assurer la survie de plusieurs centaines de milliers de militants du mouvement ouvrier allemand.
Résistance sociale-démocrate (SPD)
La chasse aux sociaux-démocrates dès le début du régime nazi a d'emblée réduit la résistance sociale-démocrate qui mettra donc du temps à s'affirmer. La répression s'abat dès le début du régime. En juin 1933, pendant la semaine sanglante de Köpenick, les arrêtent plus de 500 militants socialistes et communistes dans ce quartier ouvrier de Berlin ; beaucoup sont torturés ou tués. En 1936, 1 687 militants sociaux-démocrates sont arrêtés, et 8 058 en 1937. Plusieurs milliers de procès sont intentés pendant toute la période nazie, et sont souvent collectifs, comme celui de l'organisation Spengemann, en octobre 1938, où comparaissent 240 accusés. Soixante-deux députés SPD sont assassinés, cinquante-quatre partent en exil. Quelques mouvements de résistance sociale-démocrate :
Direction du SPD, exilée à Prague (Sopade). Le 8 janvier 1934, elle publie le Manifeste de lutte du socialisme révolutionnaire.Groupes de jeunesses socialistes (à Francfort par exemple).
Revue clandestine de jeunes socialistes : Blick in die Zeit.
Groupe Roter Stoßtrupp (novembre 1933, dure peu de temps) : Rudolf Küstermeier et Karl Zinn.
Groupe Neu Beginnen. Créé dès 1929, se rapproche du Volksfront, alliance éphémère de communistes et de sociaux-démocrates (novembre 1935). Programme commun des deux en 1938 (Deutsche Freiheit). Démantelé par la police de 1938 à 1944.
Sociaux-démocrates participants à la tentative de putsch du 20 juillet 1944 : Julius Leber, Theodor Haubach, Carlo Mierendorff et Adolf Reichwein.
Résistance socialiste indépendante du SPD
Parti SAP (Sozialistische Arbeiterpartei) (créé en 1931). Parmi ses membres : Fritz Bauer, Willy Brandt. Relié à l'étranger (direction en exil à Paris). Le SAP diffusait clandestinement le journal Das Banner der revolutionären Einheit.
Parti Internationaler Sozialistischer Kampf-Bund (ISK). Fondé par Leonhard Nelson. Membres : Willy Eichler dirige une antenne à Paris de 1933 à 1940, puis à Londres (informations à la BBC en direction de l'Allemagne).
Résistance communiste (KPD)
Les communistes sont une cible prioritaire de la répression nazie. Ainsi, cinquante-sept députés de la KPD sont assassinés, vingt prennent le chemin de l'exil pour échapper à ce sort. Pour autant, la KPD clandestine reste forte, puisque 70 % des tracts et brochures saisis par la Gestapo en 1937 sont imprimés par des militants communistes.
L'entrée en guerre contre l'URSS en juin 1941 va relancer la résistance communiste, réanimée par des agents soviétiques (surtout des Allemands exilés).
L'Orchestre rouge
En 1942, deux groupes communistes séparés se créent, connus sous le nom commun de Rote Kapelle (Orchestre rouge) qui reste le nom le plus connu de la résistance communiste contre le nazisme.
Le premier Orchestre rouge était un réseau d'espionnage basé à Berlin et coordonné par Leopold Trepper (agent duNKVD envoyé en Allemagne en octobre 1941). Ce groupe agit en France en coordination avec le PCF clandestin. Ils purent écouter les lignes téléphoniques de l'Abwehr à Paris. Trepper fut arrêté et le groupe éclata au printemps 1943.
Le second et principal Orchestre rouge était un groupe de résistance d'origine allemande, pas contrôlé par le NKVD, et d'obédience communiste (mais tous n'étaient pas communistes).
Membres de groupe :
Chef 1 : Harro Schulze-Boysen (officier de renseignement au ministère de l'Air du Reich, communiste).
Chef 2 : Arvid Harnack (haut fonctionnaire au ministère de l'Économie, communiste).
Adam Kuckhoff (producteur de théâtre).
Günther Weisenborn (auteur).
John Graudenz (journaliste).
Helmut Roloff (pianiste).
Ce groupe rassemblait des informations sur les crimes nazis et distribuait des tracts antinazis. À partir de la fin de l'année 1941, l'organisation Harnack/Schulze-Boysen coopéra avec les bureaux des renseignements soviétiques de Paris et Bruxelles. Il transmettait aussi des informations à l'étranger à travers l'ambassade américaine et indirectement à l'URSS. Le groupe a été arrêté par la Gestapo en août 1942.
Résistance communiste issue du KPD
Les groupes les plus connus sont :
L'Aide Rouge (Die Rote Hilfe)
Organisation communiste fondée en 1924 par le KDP.
Activité : soutient les persécutés du régime national-socialiste.
Issue : organisation interdite en 1933 et dissoute en 1936 par les Nazis.
Wilhelm Knöchel 1899-1944
Le groupe de Wilhelm Knöchel (Ruhr) (1941-1943)
Fondé en 1941 par Wilhelm Knöchel (qui dirige depuis 1935 le comité exilé du KPD à Amsterdam et rentre en 1941 en Allemagne pour réorganiser la résistance dans la Ruhr).
Activité : diffusion du journal antinazi Le Combattant de la Paix (Der Friedenskämpfer).
Issue : Wilhelm Knöchel est arrêté par la Gestapo en 1943 et exécuté en 1944, et son groupe démantelé. Une cinquantaine de résistants du groupe sont arrêtés et tués.
Le groupe de Josef (Beppo) Römer (1940-1942)
Fondé par Josef Römer (qui avait publié à la fin des années 1920 un journal communiste, Aufbruch, et est déporté de 1933 à 1939).
Activité : Josef Römer tente d'organiser un attentat contre Hitler et contacte les cercles de résistance d'Adam von Trott zu Solz et Robert Uhrig. En 1940, Römer diffuse le journal clandestin Informationsdiens.
Issue : Josef Römer est arrêté en 1942 et exécuté en 1944.
Werner Seelenbinder 1904-1944
Le groupe de Robert Uhrig (Berlin) (1938-1942)
Fondé en 1938 à Berlin par Robert Uhrig (déjà arrêté en 1934 pour activité clandestine). Groupe de 100 membres en 1940 et 200 en 1942.
Activité : formation des groupes de résistants communistes au sein des entreprises, tentative de créer un service de renseignements avec d'autres mouvements, notamment Harnack/Schulze-Boysen.
Issue : organisation démantelée par la Gestapo en 1942. Une centaine de résistants (dont Robert Uhrig, Werner Seelenbinder) sont arrêtés, déportés en camp de concentration, et exécutés en 1944. Les survivants rejoignent le groupe d'Anton Saefkow.
Le groupe de Walter Budeus (Berlin) (1936-1942)
Fondé en 1936 par Walter Budeus dans l'entreprise où il travaille (Berlin). Groupe d’une cinquantaine de résistants.
Activité : collecte d’informations sur l'industrie de guerre, diffusion de tracts. Contact à la fin des années 1930 avec les groupes de Robert Uhrig et Beppo Römer.
Issue : Walter Budeus est arrêté en 1942 et condamné à mort en 1944.
Le groupe de Bernhard Bästlein, Oskar Reincke et Franz Jacob (Hambourg) (1941-1944)
Fondé en 1941-1942 par Bernhard Bästlein, Oskar Reincke et Franz Jacob au sein des chantiers navals de Hambourg.
Activité : diffusion de tracts, envoi des lettres aux soldats stationnés au front de l'Est pour les inciter à refuser de combattre. En contact avec d'autres mouvements de résistance, notamment l'organisation Harnack/Schulze-Boysen.
Issue : arrêtés par la Gestapo en 1943 puis 1944. Une soixantaine de résistants exécutés en 1944-1945.
Le groupe d'Anton Saefkow et Franz Jacob (Berlin) (1943-1944)
Fondé en 1943.
Activité : diffusion de tracts, en contact en 1944 avec Julius Leber et Adolf Reichwein, résistants sociaux-démocrates membres du complot du 20 juillet 1944.
Issue : la Gestapo arrête en juin 1944 Anton Saefkow, Franz Jacob, Julius Leber et Adolf Reichwein. Des centaines de résistants de ce groupe sont arrêtés et assassinés.
Le groupe de Theodor Neubauer et Magnus Poser (Thuringe) (1942-1944)
Fondé en 1942 par Theodor Neubauer (qui était déjà passé par des camps de concentration).
Activité : en contact avec d'autres groupes de résistance, par exemple avec un groupe de l'université d'Iéna, ainsi qu'avec un groupe du camp de concentration de Buchenwald, envoi de nourriture, de tracts et d’armes aux prisonniers.
Issue : Theodor Neubauer est arrêté en 1944 et exécuté en 1945.
Harro Schulze-Boysen
Le groupe de Georg Schumann et Otto Engert (Leipzig) (1943)
Fondé vers 1943.
Activité : ambition d’unifier les divers mouvements de résistance communistes, donc en contact avec les groupes de Harro Schulze-Boysen, de Theodor Neubauer et Magnus Poser, d’Anton Saefkow, mais aussi avec des prisonniers de guerre russes et des travailleurs de force étrangers.
Issue ?
L'organisation Allemagne libre (Freies Deutschland) (1943)
Fondé à Cologne en 1943 par un réseau de résistants communistes. Groupe de plus de 200 membres de toutes idéologies.
Activité : diffusion de tracts incitant à des sabotages et des désertions, aide aux travailleurs de force étrangers prisonniers en Allemagne.
Issue : la Gestapo arrête de nombreux membres du groupe, qui se disloque.
Comité national de l'Allemagne libre (NKFD 1943).
Fondé à Moscou 12 juillet 1943, à Krasnogorsk (à proximité de Moscou), par le comité central du KPD exilé en URSS et des militaires faits prisonniers de guerre après la capitulation de la 6e armée à Stalingrad. Le poète Erich Weinert présidait le comité, composé également de membres influents du parti comme Wilhelm Pieck et Walter Ulbricht, futurs dirigeants de la RDA. Président du comité : Erich Weinert, écrivain allemand.
Activité : détourner les prisonniers de guerre allemands du nazisme et encourager les soldats allemands (de toutes idéologies) à déserter ou à se rendre à l'Armée rouge. Le Comité prétendait lutter pour la chute d'Hitler et du national-socialisme, censés mener l'Allemagne à sa destruction, et militer pour une Allemagne libre et indépendante dans les frontières de 1937. En RFA, l'historiographie a souvent décrit le mouvement comme une trahison de l'Allemagne plus ou moins forcée par les Soviétiques. En RDA au contraire, le mouvement était célébré comme la véritable résistance au nazisme avec le KPD comme avant-garde. D'autres mouvements comme Allemagne Libre (Freies Deutschland) sont fondés sur le modèle du NKFD en août et septembre 1943 en France, Belgique et Suisse par des exilés communistes allemands, souvent résistants et vivant dans la clandestinité dans les deux premiers pays et souvent internés en camps pour réfugiés et agissant clandestinement pour le troisième.
Résistance communiste indépendante du KPD
Les groupes les plus connus sont :
Parti communiste d'Allemagne oppositionnel, (KPO)
Fondé en 1928 par exclusion de militants du KPD critiques. Après 1933 : fonde en France un comité exilé (Auslandskomitee, AK) en contact, grâce à un réseau de messagers, avec les résistants du KPO en Allemagne.
Activités : information sur le régime hitlérien, former avec les résistants exilés une union des travailleurs contre le nazisme, diffusion de tracts, création des cellules syndicales clandestines.
Issue : bien organisé, semble avoir échappé à la Gestapo.
L'Orchestre rouge (die Rote Kapelle) : lire plus haut.
Le groupe d’Herbert et Marianne Baum (Berlin) (1938-1942)
Fondé en 1938-1939 par Herbert Baum (électricien juif) et sa femme Marianne (qui luttaient depuis 1933 au sein des jeunesses communistes) avec des adolescents juifs proches du communisme. Jusqu'à 100 membres.
Activité : jusqu'en 1941, c'est un groupe d'études. À partir de 1941, il entre dans la résistance active : diffusion de tracts antifascistes et, en mai 1942, attaque (désordonnée) contre le centre de propagande antisoviétique (Das Sowjetparadies) de Lustgarten (Berlin).
Issue : arrestations en 1942. Donc de très nombreux morts par exécution (une vingtaine), suicide (Herbert Baum) et en camp de concentration. Mais aussi déportation en camp de concentration de 500 juifs berlinois à titre de représailles.
Les RKD (Communistes révolutionnaires d'Allemagne).
Les groupes communistes de conseils issus du Parti communiste ouvrier d'Allemagne (KAPD, créé en 1920) : Kommunistische Räte-Union et Rote Kämpfer.
Résistance protestante
Le régime nazi tenta d'embrigader les protestants à travers le mouvement des Chrétiens allemands qui prend le pouvoir au sein de l'Église protestante du Reich constituée en 1933. Des initiatives de résistance voient le jour en opposition à cette mainmise.
Martin Niemöller 1892-1984
Ligue d'urgence des pasteurs de Martin Niemöller
La Ligue d'urgence des pasteurs (Pfarrernotbund) du pasteur Martin Niemöller, créée en 1933, est l'organisation de résistance protestante la plus importante. Localement, il s'agira de conseils de frères (Bruderräte), rassemblées en un Conseil de frères du Reich (Reichsbruderrat), qui s'unit aux synodes libres.
Lors du deuxième synode libre national (1934), les opposants créent une Église confessante (Bekennende Kirche). Ses personnalités sont Friedrich Weißler (juriste, mort déporté en 1937), le pasteur Paul Schneider (mort déporté en 1939).Theophil Wurm (évêque du Wurtemberg), prend la succession de Niemöller à la tête de l'Église confessante. Il entre en contact avec Friedrich Bonhoeffer, avec le groupe de Carl Goerdeler et avec le Cercle de Kreisau.
Autres organisations protestantes
Heinrich Grüber 1891-1975 Werner Sylten 1893-1942
Bureau Grüber (1938) : soutient les protestants d'origine juive. Chef : pasteur Heinrich Grüber (déporté), Werner Sylten (protestant d'origine juive, mort déporté).
Le pasteur Dietrich Bonhoeffer s'oppose au nazisme dès 1933. Il organise le séminaire semi-clandestin de l’Église confessante allemandedans la localité de Finkenwalde (aujourd'hui Zdroje), un quartier de Stettin (aujourd'hui Szczecin). En contact via son beau-frère Hans von Dohnányi avec le groupe de résistance de Hans Oster, il est proche du groupe des conjurés de l'attentat contre Hitler du 20 juillet 1944. Arrêté en avril 1943, il est exécuté en avril 1945. Ses réflexions théologiques, particulièrement celles sur le christianisme sans religiosité consignées dans son journal de captivité Résistance et Soumission, eurent un impact important sur la théologie protestante d'après-guerre.
Pasteur Helmut Gollwitzer (Berlin).
Pasteur Paul Gerhard Braune, qui s'opposa à l'extermination (dite euthanasie des malades mentaux, asociaux et anti-sociaux, intervint auprès de la chancellerie du Reich en faveur des chrétiens non aryens, protégea les déserteurs et les homosexuels.
Résistance catholique
Hitler tente de se concilier les catholiques avec le concordat signé avec le Pape en 1933. Mais, en tant que minorité, les catholiques furent souvent portés à la résistance antinazie. Avant même 1933, les bastions électoraux du parti catholique Zentrum étaient les moins perméables à la propagande nazie.
Autorités officielles de l'Église catholique
Pie XI (Ambrogio Damiano Achille Ratti) 1857-1939
Encyclique Mit brennender Sorge du pape Pie XI (14 mars 1937), parvenue secrètement en Allemagne, lue en chaire dans toutes les églises d'Allemagne le 21 mars 1937, dimanche des Rameaux. Cette encyclique a été publiée volontairement par le Vatican en allemand. Elle est distribuée dans les églises et diffusée dans la presse le 22 mars 1937. Les nazis déportent aussitôt 306 prêtres au Camp de concentration de Dachau.
Konrad von Preysing (évêque de Berlin) : un des rares évêques ouvertement antinazi.
Erich Klausener (directeur de l'action catholique de l'évêché de Berlin) organise une énorme messe en plein air, puis est assassiné le 30 juin 1934.
Michael von Faulhaber (archevêque) proteste en 1940 auprès du ministre de la Justice au sujet de l'assassinat des invalides et des malades mentaux.
Clemens August von Galen (évêque de Münster) proteste officiellement en 1934 contre Alfred Rosenberg (théoricien du nazisme païen). En 1941, il condamne en chaire l'assassinat des malades mentaux et des invalides. Il a été béatifié par le pape Benoît XVI le 9 octobre 2005.
Mühler (ancien dirigeant de l'action catholique de Munich) est arrêté en 1933 pour avoir parlé du camp de concentration de Dachau.
Bernhard Lichtenberg (prieur de la cathédrale de Berlin) appelle au lendemain de la Nuit de cristal (novembre 1938) à prier pour les Juifs et les prisonniers des camps de concentration (il est mort déporté en 1943). Il a été béatifié par Jean-Paul II le 23 juin 1996 dans le stade olympique de Berlin en même temps que Karl Leisner.
Karl Leisner, diacre ordonné le 25 mars 1939 en vue du sacerdoce arrêté par la Gestapo le 8 novembre 1939. Le 17 décembre 1944, dans le bloc 26 du camp de concentration de Dachau, Mgr Gabriel Piguet, évêque de Clermont-Ferrand, détenu lui aussi, ordonne Karl Leisner prêtre. Celui-ci est presque mourant. Il est libéré par l'armée américaine le 4 mai 1945 et part au sanatorium de Planegg (près de Munich) où il meurt le 12 août 1945. Il été béatifié par Jean-Paul II à Berlin en 1996 avec Bernhard Lichtenberg.
Organisations et groupes catholiques
Hans Scholl 1918-1943 Sophie Magdalena Scholl 1921-1943
La plus connue de ces organisations est le mouvement de La Rose blanche (notamment représentés par Hans et Sophie Scholl), qui distribuait des tracts antinazis dans les lycées et à travers toute l'Allemagne.
Indépendamment du précédent, le mouvement plus informel de la Rose blanche de Hambourg comprend des membres chrétiens convaincus, mais aussi des juifs et des socialistes.
Membre du Zentrum : le père jésuite Max Pribilla, Fritz Gerlich et Ingbert Naab dans la revue catholique Der Gerade Weg, Bernhard Letterhaus, Erich Klausener, chef de l'Action catholique, Kuno Kamphausen et Adalbert Probst, responsables d'associations catholiques de jeunesse (exécutés lors de la Nuit des Longs Couteaux), Gustav von Kahr, ancien commissaire de l'État de Bavière.
Comité d'aide aux non aryens catholiques (créé 22 mars 1935) pour aider les catholiques d'origine juive.
Junge Front : journal des jeunesses catholiques réservé face aux nazis donc interdit de publication à plusieurs reprises puis définitivement en janvier 1936. Peu après, 50 dirigeants de mouvements catholiques sont arrêtés.
Émission radio catholique clandestine de Walter Klingenbeck (1941) (exécuté en 1943). Autres membres : Daniel von Recklinghausen et Hans Haberl.
Revue Der Gerade Weg : Konrad Graf von Preysing, Fritz Gerlich (assassiné 1934), Ingbert Naab. Parmi les conjurés du 20 juillet 1944 : les pères jésuites Alfred Delp, Lothar König et Augustin Rösch.
L'opposition catholique put relever la tête début 1944, alors que le soutien au régime nazi s'effondrait dans la population. Le parti catholique centriste Zentrum s'étant volontairement sabordé en 1933 (et non pas détruit par les nazis comme le SPD et le KPD), il avait pu se poursuivre à travers des groupes informels et put donc renaître. Ses chefs, Jakob Kaiser et Max Habermann décident de passer à l'action début 1944. Ils réactivent les réseaux du Zentrum dans l'attente du coup d’État du 20 juillet 1944 contre Hitler.
Initiatives individuelles catholiques
Le père Eckert protesta alors au nom de l'éthique chrétienne contre la persécution des Juifs.
Père Rupert Mayer (jésuite) : sermons critiques.
Père August Froehlich proteste et de la dignité des ouvriers polonais maltraités (mort déporté en 1942).
Père Joseph Lenzel assassiné par les nazis pour sa protection des lois et de la dignité des ouvriers polonais maltraités (mort déporté en 1942).
Père Albert Willimsky proteste et de la dignité des ouvriers polonais maltraités (mort déporté en 1940).
Père Muckermann, exilé aux Pays-Bas, diffuse des tracts condamnant le nazisme et la politique d'Hitler.
Margarete Sommer (universitaire) aide des catholiques d'origine juive.
Gertrud Luckner (qui travaillait pour l'organisation de bienfaisance catholique Caritas) aide des prisonniers de guerre et des Juifs. Elle sera déportée.
Franz Reinisch (prêtre) est exécuté en 1941 après avoir refusé de prêter serment à Hitler.
Max Josef Metzger (prêtre) est exécuté en 1943 pour pacifisme.
Nikolaus Gross laïc, syndicaliste, exécuté en 1945, béatifié par Jean-Paul II.
Hermann Josef Wehrle
Gereon Goldmann aurait agi en solo puis aurait été contacté par un réseau.
Les anarcho-syndicalistes de la FAUD
Lors de son dernier congrès national, à Erfurt en mars 1932, l'Union libre des travailleurs allemands (Freie Arbeiter-Union Deutschlands, FAUD) décide qu’en cas de prise de pouvoir par les nazis son bureau fédéral à Berlin serait dissous, qu’une direction clandestine serait mise en place à Erfurt et qu’elle riposterait par une grève générale immédiate. Cette dernière décision ne put être mise en pratique : partout, en Allemagne, la FAUD est décimée par des vagues d’arrestations.
Les anarcho-syndicalistes combattent les nazis de manière violente avec les Schwarze Scharen (Foules noires), une milice d'environ 500 membres.
Les anarcho-syndicalistes en exil fondent en 1933-1934 le groupe « Deutsche Anarcho-syndikalisten » (DAS, Anarcho-syndicalistes allemands) avec un bureau à Amsterdam.
Jusqu'en 1935, la FAUD organise un réseau d’évacuation de militants vers la Hollande, réseau qui sert aussi à introduire en Allemagne de la littérature antinazie.
En 1936, beaucoup de militants partent en Espagne pour participer à la révolution sociale. Le bureau de Barcelone de la DAS comprend une vingtaine d'entre eux comme Helmut Rüdiger, Augustin Souchy, mais aussi des intellectuels allemands comme le critique littéraire Carl Einstein.
En 1937, deux cents militants anarcho-syndicalistes sont arrêtés, par la Gestapo, pour leurs activités syndicales clandestines. Les hommes arrêtés sont tous des partisans convaincus du mouvement anarcho-syndicaliste, écrit dans son rapport le policier chargé de coordonner l’action, et il ajoute cette remarque lourde de menaces : Ils sont tellement convaincus de la justesse de leurs idées qu’ils ne pourront que difficilement être rééduqués pour devenir des membres utiles à la communauté du peuple allemand.
Julius Nolden, ouvrier métallurgiste et militant anarcho-syndicaliste de la FAUD, est une figure de premier plan de la résistance anti-nazie en Rhénanie. Le 5 novembre 1937, il est condamné par le Tribunal du peuple de Berlin à une peine de dix ans de réclusion pour préparation d'une entreprise de haute trahison avec circonstances aggravantes. Il purge sa peine dans le pénitencier de Lüttringhausen jusqu'à sa libération par les Alliés le 19 avril 1945.
Résistance militaire
L'indépendance de l'Armée a été fortement réduite en 1938 lorsque le ministre de la Défense, le général Werner von Blomberg, et le chef de l'armée, le général Werner von Fritsch, ont tous deux été révoqués par le régime nazi. Cependant, les éléments résistants se maintinrent au sein de l'armée. En particulier, certains militaires ont œuvré contre le régime nazi, d'abord en faisant de l'espionnage en faveur des Anglais et Américains, puis en tentant d'assassiner Hitler. Ce groupe, nommé par la Gestapo la Schwarze Kapelle (l'orchestre noir en allemand) comprend notamment des membres des services secrets, des officiers actifs et d'autres qui ne l'étaient pas ou plus (comme Ludwig Beck, qui avait démissionné, ou Erwin von Witzleben, confronté à des soucis de santé).
Plus que les craintes sur l'indépendance de l'armée, le principal moteur de la résistance militaire a été l'analyse froide et professionnelle des rapports de forces et de la situation militaire globale dans laquelle se trouve l'Allemagne à partir de l'été 1943.
Composition
La résistance militaire est constituée d'un entrelacs de réseaux familiaux et mondains hérités de la période précédente et de militaires ayant analysé de manière professionnelle les évolutions du conflit à partir de 1942. Soudés par l'opposition à la fois à la République et la formulation de réserves envers le IIIe Reich, ces militaires peuvent néanmoins être classés en deux groupes définis par l'âge et le grade : Les généraux et maréchaux, qui ont connu l'empire, la Grande Guerre, qui ont perdu leur influence après 1938 et qui ont des idées conservatrices ; les officiers qui les entourent, plus jeunes, plutôt révolutionnaires conservateurs, plus ouverts quant à l'opportunité de nouer des contacts avec la résistance social-démocrate.
La résistance au sein des services secrets
Les services secrets formaient le principal centre d'opposition au régime. Par nature, ils pouvaient mener toutes sortes d'opérations incontrôlables par le régime. Les principaux résistants au sein des services secrets furent :
L'amiral Wilhelm Canaris, responsable de l'Abwehr, le service de renseignements de l'armée allemande, de janvier 1935 à février 1944, qui s'est clandestinement opposé aux menées nazies tout en restant loyal envers l'Allemagne. Cependant, il a deux puissants ennemis en Reinhard Heydrich et Heinrich Himmler. C'est la SS qui vient l'arrêter au lendemain de l'attentat contre Hitler du 20 juillet 1944. Il est exécuté le 9 avril 1945 au camp de concentration de Flossenbürg.
Le général Hans Oster, entré au service de renseignements de l'armée allemande en 1933, antinazi depuis 1934 et chef d'un des services de l'Abwehr à partir de 1938, était protégé par l'amiral Wilhelm Canaris. Il bâtit un vaste réseau clandestin de militaires antinazis. Dès 1936, Oster et Gisevius étaient persuadés que la seule solution était de tuer Hitler. Canaris, dont les papiers sont saisis après son arrestation, l'entraîne dans sa chute.
Hans-Bernd Gisevius (haut fonctionnaire du ministère de l'Intérieur) secondait Oster.
Hjalmar Schacht, le gouverneur de la Reichsbank, était en contact avec ce groupe d'opposants.
Le coup d’État avorté de 1938
Ernst von Weizsäcker 1882-1951
En mai 1938, les chefs de l'armée apprennent l'intention d'Hitler d'envahir la Tchécoslovaquie, risquant ainsi une guerre générale en Europe. Le chef d'état-major de l'Armée, le général Ludwig Beck, jugeait une telle guerre immorale et mauvaise pour l'Allemagne. Fait surprenant, Oster (chef des renseignements militaires allemands) et le général Beck (chef de l'armée allemande) envoient alors des émissaires à Paris et Londres pour conseiller aux démocraties occidentales de résister aux demandes d'Hitler. Von Weizsäcker (aux Affaires étrangères) envoie aussi des messages privés pour inciter le gouvernement britannique à la fermeté. Britanniques et Français ne sauront pas comment utiliser ces informations.
En août 1938, le général Beck exprima ouvertement son opposition à une guerre contre les Occidentaux au sujet de la Tchécoslovaquie. Hitler renvoya alors Beck, ce qui choqua le corps des officiers. Son successeur comme chef d'état-major de l'Armée, le général Franz Halder, resta en contact avec les opposants Beck et Oster, et disait en privé qu’Hitler était l'incarnation du mal.
En septembre 1938, un coup d'État militaire contre Hitler fut préparé avec la complicité du Generalfeld marschall Erwin von Witzleben, chef de la région militaire de Berlin. Le complot comprenait Oster, Gisevius, Schacht, Weizsäcker, Canaris et Halder. Le coup d'État devait intervenir dès qu'Hitler ferait un pas vers la guerre. Le chef de l'armée, le général Walther von Brauchitsch, fut au courant du complot, prévint qu'il ne le soutiendrait pas, mais ne dit rien à Hitler. Exemple du code du silence entre officiers.
Les conjurés espéraient lancer leur coup d'État à l'occasion de la crise des Sudètes entre l'Allemagne, la Grande-Bretagne et la France. Cependant, ces derniers acceptèrent un accord (les Accords de Munich) avec Hitler. La paix était sauvée. Hitler ne passait plus pour un fauteur de guerre. Les officiers avaient perdu leur prétexte pour le renverser. Il faudra attendre le 20 juillet 1944 pour retrouver un complot aussi avancé.
Les projets de putsch de 1939
Avec la remontée du risque de guerre mi-1939, Oster, toujours en contact avec Halder, Witzleben (qui n'est plus à Berlin, ce qui complique les choses), Goerdeler, tente de relancer le projet de putsch. Mais il apparaît que les officiers sont beaucoup moins prêts à suivre. En particulier, les officiers prussiens sont séduits par le projet d'Hitler de reprendre Dantzig et la Haute-Silésie à la Pologne.
Nevile Henderson 1882-1942
Fait toujours extraordinaire, les chefs de l'armée continuent cependant de vouloir éviter la guerre et pressent la France et la Grande-Bretagne de montrer leur fermeté face à Hitler : Halder rencontre secrètement l'ambassadeur britannique Sir Nevile Henderson pour l'inciter à la résistance. L'objectif était toujours de lancer un coup d’État quand Hitler déclarerait la guerre. Mais Schacht, Gisevius et Canaris n'arrivent pas à obtenir une décision ferme de coup d'État de la part de Brauchitsch et Halder. Quand Hitler attaqua la Pologne le 1er septembre, les conspirateurs furent incapables d'agir.
Le déclenchement de la guerre, avec le réflexe patriotique, la dispersion de l'armée, etc. rendit un projet de putsch plus difficile.
Halder tenta d'empêcher une attaque de la France durant l'hiver 1939-1940 et resta en contact avec l'opposition via le général Carl-Heinrich von Stülpnagel (un opposant actif).
Les résistants les plus déterminés veulent tuer Hitler par bombe : Oster et Erich Kordt, qui se dit prêt à mourir lui-même dans l'opération.
Au quartier général de Zossen (sud de Berlin), un groupe d'officiers appelé Groupe d´action Zossen préparait aussi un coup d’État.
En novembre 1939 quand Hitler paraissait sur le point d'ordonner l'attaque de la Belgique, les conspirateurs persuadèrent le général Wilhelm Ritter von Leeb, commandant le groupe d'armées C à la frontière belge, de soutenir le putsch. En même temps, Oster prévint Néerlandais et Belges qu'Hitler allait attaquer. Mais Hitler remit son attaque à plus tard.
L'offensive victorieuse de mai-juin 1940 va détourner l'attention des officiers antinazis et affaiblir l'opposition au sein de l'armée.
Les attentats du groupe de Tresckow (1942-1943)
En mars 1941, Hitler dévoile à des officiers réunis à Posen (Poznań) son projet de guerre d'extermination contre l'URSS. Parmi ces officiers, le colonel Henning von Tresckow, jusque-là antinazi passif, qui décide de passer à la résistance plus active. Nommé à l'état-major de son oncle le Feldmarschall Fedor von Bock, chef du Groupe d'armée centre pour l'opération Barbarossa (invasion de la Russie). Tresckow recrute systématiquement des opposants antinazis dans son équipe, en faisant le nouveau centre nerveux de la résistance militaire. Les victoires allemandes de 1941-1942 les empêchent d'agir.
La résistance est également affaiblie par la révocation par Hitler de Brauchitsch et de Bock après l'échec devant Moscou de décembre 1941. En 1942, Oster parvient à remonter un réseau de résistance au sein de l'armée. Sa plus belle recrue est le général Friedrich Olbricht, chef du bureau général de l'armée à l'état-major du Bendlerblock (Berlin) qui disposait d'un système de communications indépendant entre toutes les unités militaires en Allemagne.
Le nouveau réseau Oster associé au groupe de Tresckow dans le Groupe centre constitue un véritable réseau fiable. Tresckow parvient à enrôler partiellement le successeur de Bock : le général Hans von Kluge. Fin 1942 Tresckow et Olbricht préparent un nouveau coup mais ils ne peuvent tuer en même temps Hermann Göring et Heinrich Himmler. En mars 1943, une tentative d'assassinat d'Hitler, lors de sa visite au quartier général du Groupe d'armée centre à Smolensk en Russie (les explosifs cachés dans des bouteilles de Cointreau dans l'avion d'Hitler n'explosent pas, le détonateur étant gelé par le froid). Les auteurs directs de la tentative sont Tresckow, le lieutenant Fabian von Schlabrendorff. Si l'attentat avait réussi, Olbricht aurait pris la tête du coup d’État.
Une seconde tentative de la part des hommes du Groupe d'armée centre échoua quelques jours plus tard lorsque Hitler visita une exposition de matériel de guerre à Berlin. Un ami de Tresckow, le colonel comte Rudolph-Christoph von Gersdorff, devait se faire sauter avec Hitler. Mais Hitler passa trop rapidement et Gersdorff dut filer aux toilettes pour arrêter le compte à rebours.
À partir de 1943, le réseau des Affaires étrangères tenta de prendre contact avec les Alliés via des diplomates dans des pays neutres.
Theo Kordt, à l'ambassade allemande de Berne, communiqua à la demande des résistants du ministère des Affaires étrangères avec les Britanniques par l'intermédiaire d'intermédiaires tels que Willem Visser 't Hooft, secrétaire général du Conseil mondial des Églises à Genève.
Le Cercle de Kreisau envoya Dietrich Bonhoeffer et Helmut von Moltke rencontré George Bell, évêque de Chichester, à une conférence religieuse à Stockholm (Suède). Bell transmit leur message et leurs plans au secrétaire au Foreign Office Anthony Eden.
Un journaliste américain, Louis P. Lochner, sortit des messages codés d'Allemagne et les transmit à Roosevelt.
D'autres messages furent envoyés à travers les réseaux catholiques du Vatican, ou via des diplomates à Lisbonne.
Mais les Alliés ne crurent pas ou rejetèrent ces messages, refusant de traiter avec la résistance antinazie.
En août 1943, Tresckow rencontre un jeune officier, le colonel Claus Schenk Graf von Stauffenberg, grand blessé de guerre, catholique, assez mystique, d'opinion nationaliste et conservatrice. Olbricht présente à Tresckow et Stauffenberg un nouveau plan : l'armée de réserve avait un plan appelé opération Valkyrie, destinée à ramener l'ordre en Allemagne en cas de désordres civils. Olbricht suggéra que ce plan soit détourné pour prendre le contrôle de l'Allemagne, désarmer la SS et arrêter les dirigeants nazis après la mort d'Hitler. Il s'agissait de convaincre le commandant en chef de l'armée de réserve, le général Friedrich Fromm. Il s'agissait aussi de parvenir à tuer Hitler. Pour cela, durant l'hiver 1943-1944, les conspirateurs s'attachent à avoir un de leurs hommes proches d'Hitler qui apparaissait toutefois de moins en moins en public, ce qui rendait toute éventuelle tentative d'attentat plus compliquée. Il semble que plusieurs tentatives aient alors échoué de peu. L'étau se resserre cependant autour des résistants : en janvier et février 1944, Moltke puis Canaris sont arrêtés. Le 4 juillet 1944, Julius Leber, qui tentait de relier son parti SPD clandestin avec le KPD, est arrêté.
L'attentat du 20 juillet 1944
Le 20 juillet 1944, dans l'après-midi, Stauffenberg fait exploser sa bombe à quelques mètres d'Hitler. La répression qui suit cette tentative brise complètement la résistance conservatrice, présentée à la population comme un groupe de Junkers coupés du peuple.
Autres
Johannes Blaskowitz 1883-1948
Le général Johannes Blaskowitz, adjoint d'Halder, proteste auprès d'Adolf Hitler au sujet du traitement des Polonais et des Juifs. Ces protestations sont relayées par un nombre important d'officiers cantonnés en Pologne, qui s'indignent du traitement réservé aux Polonais de Posnanie, contraire aux traditions prussiennes.
À la toute fin du conflit, quelques jours avant la prise de Munich par les Américains, un groupe d'officiers et de soldats tente un coup d'état dans la ville, prend le contrôle de la mairie et de la radio, lance un appel à la chasse aux faisans (du nom des fonctionnaires du NSDAP) et expose un programme politique proche de celui des conjurés du 20 juillet 1944. Les SS, appuyés par quelques membres du parti, répriment cette tentative devant une population qui attend l'arrivée des Américains.
Résistance conservatrice
Le gros de la résistance conservatrice est constitué de la résistance au sein de l'armée.Des personnalités ont également cherché à renverser le nazisme comme le complot de Claus Schenk von Stauffenberg ou le Cercle de Kreisau.
Le Cercle de Kreisau
Le Cercle de Kreisau est l'un des mouvements de la résistance allemande les plus connus. Il n'était pas composé que de membres conservateurs, mais ses membres venaient essentiellement de cette mouvance (officiers et hauts fonctionnaires de l'aristocratie). De 1938 à l'attentat du 20 juillet 1944, il comptait vingt membres actifs et environ vingt sympathisants. Le domaine de Kreisau (Silésie), appartenant à la famille von Moltke, a abrité de 1940 à 1943 des rencontres de fonctionnaires et d'officiers, d'ecclésiastiques catholiques et protestants, d'hommes politiques conservateurs mais aussi sociaux-démocrates. Leurs réflexions devaient préparer une Allemagne postnazie, démocratique, humaniste, sociale et européenne. Le cercle a été créé par un avocat, le comte Helmuth James von Moltke. D'éducation partiellement britannique (par sa mère), il aurait été surnommé le comte rouge
Le groupe de Franz Sperr au sud de l'Allemagne (en contact avec de hauts officiers).
Un groupe de dirigeants travaillistes catholiques de Cologne.
Le cercle de Fribourg.
Des communistes modérés non staliniens.
À partir de 1943, certains membres du Cercle de Kreisau décidèrent de passer à l'action contre le régime et prirent contact avec Ludwig Beck, Carl Friedrich Goerdeler, Ulrich von Hassel et Claus Schenk von Stauffenberg. La plupart des membres du Cercle de Kreisau furent inculpés de haute trahison après le putsch du 20 juillet 1944 et furent condamnés à mort.
Les principaux membres du Cercle de Kreisau sont :
Le comte Helmuth James von Moltke (avocat).
Le comte Peter Yorck von Wartenburg (haut fonctionnaire).
Adam von Trott zu Solz (juriste ouvert sur l'international, fonctionnaire au ministère des Affaires étrangères). Exécuté le 26 août 1944.
Hans-Bernd von Haeften (juriste, très haut fonctionnaire au ministère des Affaires étrangères). Exécuté le 15 août 1944.
Julius Leber (ancien député social-démocrate). Exécuté le 5 janvier 1945.
Theodor Haubach (philosophe socialiste ?). Exécuté le 23 janvier 1945.
Carlo Mierendorff (ancien député social-démocrate SPD). Mort en décembre 1943 lors d'un bombardement allié à Leipzig.
Adolf Reichwein (professeur d'histoire social-démocrate). Exécuté le 20 octobre 1944.
Otto Heinrich von der Gablentz. Proche du socialisme religieux. En contact avec la résistance norvégienne. La Gestapo ignore sa participation au putsch du 20 juillet 1944. Il a survécu à la guerre.
Carl Dietrich von Trotha (haut fonctionnaire au ministère de l'Économie). Il a échappé à la Gestapo et survécu au régime nazi.
Horst von Einsiedel (membre du SPD). Destin terrible : s'il échappa à la Gestapo, il sera arrêté en 1945 par les Soviétiques et mourra en 1948 dans l'ex-camp de concentration nazi de Sachsenhausen, alors utilisé par les Soviétiques.
Theodor Steltzer (haut fonctionnaire de la république de Weimar). En 1940, ayant un haut poste militaire dans la Norvège occupée, où entra en contact avec la résistance norvégienne. Il survécut à la guerre.
Harald Poelchau (aumônier de prison influencé par le socialisme religieux). Il ne fut pas démasqué par la Gestapo après le 20 juillet 1944.
Hans Peters (professeur de droit et politique à Berlin). Son appartenance au Cercle de Kreisau ne fut pas découverte par la Gestapo et il survécut.
Alfred Delp (jésuite, prêtre à Munich, fut rédacteur de la revue catholique Stimmen der Zeit jusqu'à son interdiction en 1941). Arrêté en juillet 1944 et exécuté le 2 février 1945.
Lothar König (jésuite). Après le 20 juillet 1944, se cacha dans la cave à charbon du collège de jésuites Berchman jusqu'à la fin de la guerre.
Augustin Rösch (provincial des jésuites responsable du sud de l'Allemagne). Arrêté par les nazis le 11 janvier 1945, mais pas tué.
Paulus van Husen (juriste et important homme politique du parti centriste en Silésie). Arrêté en août 1944, mais libéré par les troupes soviétiques.
Hans Lukaschek (important politicien centriste de Silésie, était le membre le plus âgé du cercle de Kreisau). Arrêté le 20 juillet 1944, il est libéré peu avant la fin de la guerre.
Eugen Gerstenmaier (membre du bureau des relations ecclésiastiques internationales). Arrêté par les nazis en 1944 mais libéré par les troupes américaines.
Le comte Gottfried von Bismarck-Schönhausen, pourtant membre du parti nazi au Reichstag et officier SS.
Carl Goerdeler, ancien maire de Leipzig, sera la figure principale de l'opposition au nazisme dans les années 1940-1941, alors que les officiers ont l'attention détournée par les succès militaires.
Son groupe comptait :
Le diplomate Ulrich von Hassell,
Le ministre des Finances de Prusse Johannes Popitz,
Helmuth James Graf von Moltke, chef du Cercle de Kreisau,
Goerdeler était également en contact avec le SPD clandestin de Julius Leber avec les oppositions catholiques et protestantes.
Les résistants des Affaires étrangères
Le conservateur (sans parti) Konstantin von Neurath resta ministre des Affaires étrangères du Reich de 1933 à 1938. Durant cette période, il laissa se développer un cercle actif de résistants sous le patronage discret du sous-secrétaire d'État Ernst von Weizsäcker. Les principaux membres de ce cercle étaient :
Ulrich von Hassell, ambassadeur à Rome.
Friedrich Graf von der Schulenburg, ambassadeur à Moscou.
Adam von Trott zu Solz, haut fonctionnaire.
Erich Kordt, haut fonctionnaire.
Hans-Bernd von Haeften, haut fonctionnaire.
Ce cercle survécut même lorsque le nazi Joachim von Ribbentrop remplaça Konstantin von Neurath comme ministre des Affaires étrangères, en 1938.
Résistance en Alsace-Moselle
Il faut mentionner la résistance aux forces allemandes dans ces trois départements français qui sont annexés de facto le 18 octobre 1940 au territoire allemand, par un décret d'Hitler dont la publication fut interdite, pour former le Reichsg
Au Westmark (Marche de l'Ouest : Moselle, Sarre et Palatinat) et le Reichsgau Oberrhein (Haut-Rhin : Alsace et Bade). Du fait de l'annexion, la résistance dans ces trois départements n'a presque aucune relation avec la Résistance intérieure française, ni ne reçoit de soutien matériel des forces alliées.
Paul Dungler 1902-1974
En Alsace, la résistance est animée par une base syndicalo-communiste, notamment le réseau Wodli, ou par des conservateurs comme Paul Dungler.
Enfin, il faut signaler que peu avant l'annexion, des dizaines de milliers de personnes ont quitté cette région pour s'installer dans d'autres régions françaises, où ils s'inséreront dans les groupes locaux de la Résistance.
En Moselle
Méconnue dans l'historiographie française, la Résistance dans ce département a été particulièrement forte et populaire. Plus qu'ailleurs, la population vit mal une occupation brutale qui nie la culture locale, avec notamment l'interdiction de parler français, de porter un béret, signe de francophilie, germanise les noms de familles, les prénoms, les noms de communes, interdit de donner aux nouveau-nés des prénoms à consonance française.
Ainsi dès le 15 août 1940, le rassemblement traditionnel autour de la statue de la Vierge de la place Saint-Jacques à Metz est la première protestation présidée par l'évêque de la ville Mgr Heintz qui sera expulsé dès le lendemain comme 60 % du clergé mosellan.
Sensible au fait que le général de Gaulle ait choisi la croix de Lorraine comme emblème de la Résistance, la population apporte un grand soutien notamment aux prisonniers de guerre évadés pour lesquels le département est point de passage presque obligé (par exemple le futur président de la République François Mitterrand à Säargemünd (Sarreguemines)).
Le premier sabotage recensé date du 12 août 1940. Le commandant Scharff fonde le groupe Mission Lorraine qui s'intègre à l'Organisation de résistance de l'armée (ORA) en octobre 1943. Les deux groupes les plus actifs sont le groupe Mario, autour de Jean Burger et à un degré moindre le groupe Derhan.
Plus de 1 000 Mosellans ont été arrêtés pour faits de résistance et des familles entières (environ 10 000 personnes) ont été déportées en Silésie pour opposition à la germanisation de la Lorraine. Il s'agit, en presque totalité, de famille d'ouvriers ou d'employés.
Résistance en Autriche
Le O5 est le nom d'un groupe de résistants autrichiens pendant la Seconde Guerre mondiale.
O5 ; Fritz Molden ; Major Carl Szokoll ;
Opération Radetzky; Jakob Gapp; Franz Jägerstätter.
Autres engagements individuels
Attentas
Malgré les projets de coup d'État contre Hitler montés au sein de l'armée, c'est un charpentier, autrefois proche du Parti communiste, qui réalisera en 1939 le seul véritable attentat avant la Seconde Guerre mondiale : Johann Georg Elser, qui sera déporté et exécuté. L'attentat fit huit morts, mais Hitler avait quitté la salle plus tôt que prévu.
Participation à la Résistance en France
Trois mille allemands ont participé par anti-nazisme à la Résistance intérieure française, notamment au sein de l'O.S. /Bataillons de la Jeunesse, groupes de jeunes lançant la lutte armée dont fit partie par exemple Karl Schönhaar, du Comité Allemagne libre pour l’Ouest, de différents maquis, et des FFI.
Né à Hedelflingen (près d’Esslingen, en Allemagne), d’un père allemand (Eugen Schoenhaar) et d’une mère française (Odette Pisler). Son père, un dirigeant du Secours rouge chargé de l’impression de la littérature devenue illégale après la prise du pouvoir par les nazis, sera arrêté et abattu par la Gestapo. La mère et le fils franchissent alors la frontière et se réfugient dans la famille à Lausanne ; mais Odette Pisler, ayant épousé un Allemand, a perdu sa nationalité. Menacée d’être extradée vers l’Allemagne, elle se réfugie à Paris. Demeure avec son fils 6 rue Etienne-Marey (XXe), dans l’immeuble dont Pierre Leblois était le concierge.
Karl, élève au lycée Louis-Rollin (actuellement Jacques-Decour), participe aux premières actions de résistance. Il est renvoyé du lycée sur instructions du rectorat pour ses activités politiques mais se fait admettre à l’Institut d’optique du boulevard Pasteur (XVe).
Parmi les opérations auxquelles il a participé, citons
1er février 1942, il est à la tête du détachement qui attaque des véhicules de l’armée allemande, place de la Concorde. Des explosifs sont placés sous les camions qui seront pulvérisés. Participe à l’opération Roger Debrais.
1er mars 1942, attentat contre le poste de garde n° 328 d’un bataillon de la Wehrmacht situé au 41 rue de Tanger (XIXe), avec Tardif, Tondelier et d’autres membres des Bataillons de la Jeunesse.
Il est arrêté le 8 mars 1942, lors d’une tentative d’attentat à la bombe visant l’exposition. Le bolchevisme contre l’Europe qui vient d’être inaugurée salle Wagram.
Trois mille allemands ont participé par anti-nazisme à la Résistance intérieure française, notamment au sein de l'O.S. /Bataillons de la Jeunesse, groupes de jeunes lançant la lutte armée dont fit partie par exemple Karl Schönhaar, du Comité Allemagne libre pour l’Ouest, de différents maquis, et des FFI. Karl sera fusillé à l’âge de 17 ans.
Reconnaissance et historiographie
Mémorial de la résistance allemande contre le nazisme
Plaque apposée dans la cour du Bendlerblock en mémoire des morts du complot du 20 juillet 1944 contre Adolf Hitler.
Le musée du Mémorial est situé dans le Bendlerblock, un complexe construit entre 1911 et 1914 pour abriter l’État-major de la marine. Après la Première Guerre mondiale, la direction militaire du Reich déménagea dans le bâtiment. Sous le national-socialisme, le Bendlerblock abritait aussi le bureau des affaires étrangères du renseignement et le commandement suprême de l'armée de terre. Son commandant, le général Friedrich Olbricht, planifia le complot contre Hitler. Après l'échec du complot, le comte Claus Schenk Graf von Stauffenberg, Friedrich Olbricht, Albrecht Ritter Mertz von Quirnheim et Werner von Haeften furent fusillés dans la cour d'honneur actuelle du Bendlerblock. C'est donc à cet endroit qu'on posa la première pierre d'un mémorial de résistance allemande, le 20 juillet 1952. Le maire de Berlin, Ernst Reuter, inaugura le musée un an plus tard. Le 20 juillet 1968, un centre mémorial et didactique fut ouvert, présentant une exposition permanente sur la résistance au national-socialisme. Le centre du mémorial est la cour d'honneur dans laquelle furent fusillés les résistants, le 20 juillet 1944.
Angela Merkel 1954-
Le 28 juin 2014, la chancelière allemande Angela Merkel a rendu hommage aux auteurs de l'attentat contre Hitler, qui ont su prendre une décision conforme à leur conscience, dans une situation extrêmement difficile, avant d'inaugurer le 1er juillet 2014 une nouvelle exposition permanente du Mémorial de la résistance allemande notamment consacrée à la tentative d'attentat contre Hitler.
Monuments en France
Monument à la mémoire du maquis de Bonnecombe au col de Bonnecombe dans les monts de l'Aubrac en Lozère.
Un monument simple (une pierre plantée) rend hommage au maquis formés en France par des antifascistes allemands en Haute Lozère et dans les Cévennes (maquis de Bonnecombe et de Marvejols, puis maquis Montaigne), aux côtés de la Résistance française, à partir du printemps 1943.
CES ALLEMANDS QUI LUTTÈRENT CONTRE HITLER
L'homme qui a failli tuer Hitler
La brasserie où Hitler fit ses premiers discours électorales
Après les accords de Munich, du 30 septembre 1938, il a décidé de s'engager par la force contre le régime. L'électeur communiste, le cotisant du syndicat des travailleurs du bois, s'attire même la méfiance de ses camarades de l'Union des combattants du Front rouge, car il prône la lutte ouverte. Il se fait alors embaucher dans une carrière, où il acquiert des connaissances en matière de dynamitage et en profite pour dérober des cartouches et des détonateurs. Après s'être volontairement blessé à une jambe avec une grosse pierre, Johann-Georg Elser met son congé de maladie à profit pour effectuer des tests dans Le verger parental.
Le 5 août 1939, il déménage à Munich. Là, il assemble avec minutie un boîtier tapissé de liège et y loge deux montres destinées au déclenchement de trois boulons qui frapperont simultanément trois capsules bourrées de poudre. Durant trente-cinq nuits, il parvient à se laisser enfermer dans le Bürgerbrâukeller, et il creuse une cavité dans un pilier placé près de la tribune où l'orateur honni haranguera son auditoire. Le 8 novembre 1939, vers 20 h 45, deux brigadiers allemands, le soupçonnant de désertion, l'interpellent à Constance, à 300 mètres de la frontière helvétique. Les deux policiers le placent en détention avant de le transférer vers Munich. Au même moment, à Munich, Hitler s'adresse à quelque 3 000 fanatiques. L'allocution ne dure que 50 au lieu des 90 minutes prévues. Le despote est pressé. D'autres tâches l'appellent à Berlin. De surcroît, le retour sur Berlin par avion est impossible à cause d'un épais brouillard et le trajet doit se faire par train spécial. Hitler et ses lieutenants quittent les lieux à 21 h 07. À 21 h 20, une déflagration secoue la grande salle. Maria Henle, une des serveuses, de même que sept membres du parti périssent sur le coup. Soixante-trois autres clients sont blessés, l'un d'eux succombera quelques jours plus tard.
Dès le lendemain de l'attentat, Hitler profite de l'opportunité pour attiser la haine de ses compatriotes à l'encontre des Anglais et des juifs. Le chef nazi exige de savoir qui est ce type qui a nourri le dessein de le supprimer. Il demande à Reinhard Heydrich, le chef de la Sécurité, d'user de tous les moyens pour amener ce criminel à cracher Le morceau. Hypnotisez-le, droguez-le. Je veux connaître l'identité des instigateurs. Ni lui, ni les cercles de la Résistance ne croient à l'initiative d'un comploteur solitaire. Pourtant les SS, qui interrogent Elser à Berlin, après son transfert de Munich, doivent se rendre à l'évidence lorsqu'il reconstitue, son croquis, le modèle de sa bombe. Il revendique la responsabilité de l'attentat, précise qu'il souhaitait s'implanter en Suisse; mais qu'il désirait, au préalable, fournir des détails précis sur son engin dans le but d'éviter la rafle d'innocents. Enfin, pour prévenir une extradition éventuelle, il avait emporté de la documentation relative à la confection de munitions ainsi que des informations sur des usines d'armement qu'il aurait remis aux services de renseignement suisses. Interné au camp de Sachsenhausen, Elser subit la terreur de ses geôliers. Ils veulent lui faire endosser, après l'avènement du Reich de mille ans, le rôle de témoin principal dans un simulacre de procès au cours duquel les nazis confondraient Churchill. Mais c'est l'inverse qui se produit. Après l'été 1944, lorsque les dirigeants du Reich sentent la défaite proche, Himmler, le ministre de l'Intérieur, ordonne l'exécution d'Elser le 9 avril 1945 à Dachau.
Les feuilles de la rose blanche
Sophie Scholl 1921-1943
Issus de familles bourgeoises étrangères à l'action politique, ignorant tout des méthodes de la clandestinité, les amis de la Rose blanche avaient reçu la dure éducation de la dictature et de la guerre ; influencés par leurs familles, la plupart d'entre eux s'étaient soustraits à la séduction nazie. Si Hans et Sophie avaient fait un bref passage dans les Jeunesses hitlériennes, c'était en réaction contre un père militant pacifiste et républicain, mais ils étaient vite revenus de ce détour et, grâce à ce père, ils comprenaient mieux les funestes intentions du Führer et de ses compagnons.
Les garçons, étudiants en médecine (une branche qui échappait quelque peu à l'endoctrinement nazi), avaient participé à la campagne de Russie (à partir de juin 1941) et connaissaient les crimes monstrueux qui se perpétraient là-bas, au nom de la nation allemande. Les tracts de la Rose blanche comptent parmi les très rares textes de la résistance allemande où est dénoncée avec véhémence l'extermination des Juifs.
Les Feuilles de la Rose blanche ont commencé à être diffusées à partir de juin 1942. Elles étaient essentiellement destinées à des médecins, des enseignants, des juges, des fonctionnaires dont les noms étaient choisis dans l'annuaire du téléphone. Leurs auteurs anonymes appelaient à la résistance passive. Chacun était incité à se défendre contre le fléau de l'humanité, contre le fascisme, en prenant conscience de sa responsabilité en tant que membre de la culture chrétienne et occidentale.
Il fallait donc tout faire pour empêcher la machine athée de la guerre de continuer sa course. Le peuple allemand se comporte comme un troupeau de suivistes sans volonté. Chacun attend que l'autre commence. Devant ses juges, Sophie Scholl le répétera : Il fallait bien que quelqu'un commence.
Appel à tous les Allemands
Hans Scholl 1918-1943
Fin 1942 et début 1943, la défaite de Stalingrad sonne le glas du régime nazi. Dès le printemps 1942, les bombardements des grandes villes allemandes s'étaient intensifiés et généralisés. C'est dans ce climat de plus en plus tendu qu'est diffusée la deuxième Feuille, de Hans Scholl, essentiellement consacrée à la dénonciation de la politique d'extermination menée en Pologne et en Russie, envers les Slaves et surtout les Juifs. Chacun veut s'exonérer lui-même de toute responsabilité. Chacun fait ainsi et se rendort ensuite avec la conscience la meilleure et la plus tranquille. Mais il ne peut s'acquitter lui-même. Tous un chacun est coupable, coupable, coupable.
Après avoir vécu les horreurs de la guerre sur le front de l'Est pendant plusieurs mois, entre la fin de juillet et le début de novembre 1942, les amis se retrouvent à Munich et élargissent leur action. Un groupe de la Rose blanche est alors constitué à Hambourg, un autre se fonde à Fribourg. En janvier 1943, Hans Scholl, Alex Schmorell (un ami de toujours) et Willi Graf rédigent et font circuler un cinquième tract. Cette fois, le texte est distribué dans plusieurs villes. Aussi le titre change-t-il et devient Feuilles volantes du mouvement de résistance en Allemagne. Cet Appel à tous les Allemands commence par une affirmation lapidaire : Hitler ne peut plus gagner cette guerre. Hitler mène le peuple allemand vers l'abîme.
Il annonce un jugement terrible mais juste, qui frappera tous les coupables. En outre, il revendique l'abandon de la pensée de puissance impérialiste, le rejet du militarisme prussien et prône la construction d'une Allemagne fédérale dans une Europe fédérale, dans l'esprit d'un socialisme raisonnable. Les tracts sont à présent imprimés à des dizaines de milliers d'exemplaires. En janvier 1943, au cours d'un voyage en Autriche, Alex Schmorell en expédie près de deux mille, Sophie, plus de huit cents dans la région de Stuttgart.
Trois amis décapités
Au début de février 1943, lors de la célébration des quatre cent cinquantième anniversaires de l'université de Munich, le Gauleiter, chef du parti nazi de Bavière, essuie une violente manifestation d'hostilité. La première édition de l'Appel à tous les Allemands étant épuisée, mille trois cents exemplaires supplémentaires sont imprimés et expédiés. Le 3 février, la population apprend, avec un jour de retard, la capitulation de l'armée allemande à Stalingrad. Les amis peignent alors sur de nombreuses façades des appels à la révolte. En même temps, grâce à Falck Harnack, membre important du groupe de résistance L'Orchestre rouge, en liaison directe avec les hommes qui préparent le coup d'État qui éclatera et échouera le 20 juillet 1944, la Rose blanche entre en contact avec d'autres secteurs de l'action antihitlérienne.
Un large front antifasciste se dessine. Le professeur Huber rédige un tract demandant que le destin des armées allemandes soit soustrait au dilettante Hitler et que ce qui reste de la jeunesse allemande ne soit pas sacrifié aux bas instincts de puissance de la clique nazie.
Luttons contre le parti ! Abandonnons les formations apparentées au parti ! Nous voulons la vraie science et la liberté de l'Esprit. Le 18 février, Hans et Sophie distribuent près de deux mille exemplaires de ce texte dans les salles de l'université. Mais un concierge les observe et bloque les portes. Les deux étudiants sont immédiatement transférés au siège de la Gestapo. Hans porte sur lui le texte d'un nouveau tract rédigé par Christophe Probst. La Gestapo découvre le texte dont elle identifie l'écriture. Christophe est arrêté le 19. Ce sera ensuite le tour d'Alex, de Willi et du professeur Huber.
Le procès contre Hans, Sophie et Christophe a lieu trois jours plus tard. Les accusés restent calmes malgré les hurlements du président Freisler. A l'une de ses attaques furibondes, Sophie répond tranquillement : Ce que nous avons dit et écrit, tant d'autres le pensent mais n'osent pas le dire ! Les trois amis sont décapités quelques heures après le jugement, à 17 heures, dans les locaux de la prison de Stadelheim.
Un ministre du culte contre Hitler
Dietrich Bonhoeffer se posa d'emblée en farouche adversaire du régime. Le 1er février 1933, deux jours après la nomination d'Adolf Hitler au poste de chancelier, ce pasteur, né le 4 février 1906 à Breslau en Basse-Silésie, dénonça dans une émission de radio l'autodéification du pouvoir. L'animateur lui coupa le microphone. À l'annonce, en avril 1933, du boycott décrété par les nazis contre les commerçants juifs à l'instigation de Josef Goebbels Dietrich Bonhoeffer estima que la simple protestation ne suffisait plus, mais qu'il fallait bloquer les rayons de la roue.
En réaction à l'emprise du mouvement des Chrétiens allemands, proche des nazis, qui réclamait un paragraphe sur l'aryanité, Martin Niemôller et d'autres ministres du culte berlinois fondèrent, le 11 septembre 1933, la Ligue d'urgence des pasteurs, à laquelle adhéra rapidement plus de la moitié, soit 7000, des chargés d'âmes de l'Église évangélique. Sous l'impulsion du théologien bâlois social-démocrate Karl Barth et de Martin Niemôller, l'Église confessante, branche dissidente du protestantisme, naquit lors de son synode, du 29 au 31 mai 1934, à Barmen, près de Wuppertal.
Ses responsables confièrent à Dietrich Bonhoeffer la création et l'animation des premiers séminaires, d'abord à Zingst, puis à Finkenwalde, en Poméranie. De 1935 à 1937, le maître de conférences forma des clercs, très impressionnés par son radicalisme. En 1937, Hans Kerrl, le ministre du Reich chargé des questions religieuses, proscrivit la poursuite de ces activités.
Hanns Kerrl 1887-1941
Après la Nuit de cristal, du 9 au 10 novembre 1938, Bonhoeffer lança à l'adresse des croyants cette phrase restée célèbre: Seul celui qui crie en faveur des juifs a le droit de chanter du grégorien. Entre-temps, de nombreux membres de l'Église confessante avaient opté pour la voie du compromis envers les autorités nazies. Plus tard, ils prêtèrent serment de fidélité au Führer. Le 28 mai 1936, la direction de l'Église confessante lui avait transmis un mémorandum dans lequel elle requérait, outre des mesures d'ordre cultuel, la dissolution de la Gestapo et la fermeture des camps de concentration. Après un mois passé aux États-Unis, Bonhoeffer retourna en Allemagne le 7 juillet 1939. Par l'intermédiaire de son beau-frère, Hans von Dohnanyi, il côtoya des groupes qui envisageaient d'éliminer le despote et obtint un emploi dans l'Abwehr, Le service du contre-espionnage dirigé par l'amiral Wilhelm Canaris.
Agent et messager, il voyageait beaucoup à l'étranger où il noua des contacts, y compris auprès de gouvernements alliés contre l'Allemagne. En mai 1942, en compagnie du pasteur Hans Schônfeld, il retrouva à Stockholm son ami monseigneur George Kennedy Allen Bell, l'archevêque de Chichester; il enjoignit ce dernier d'informer les autorités britanniques de l'existence d'un plan visant à supprimer Adolf Hitler. Anthony Eden, le ministre des Affaires étrangères, ne jugea pas utile d'aider les adversaires de son ennemi juré.
Le 5 avril 1943, deux mois et demi après ses fiançailles avec Maria von Wedemeyer (18 ans), Dietrich Bonhoeffer fut cueilli à son domicile berlinois, allée Marienfeld, par deux fonctionnaires en noir qui le conduisirent à la prison militaire de Tegel, où il resta détenu 18 mois sans que la moindre procédure fût engagée contre lui. Le 8 octobre 1944, la Gestapo le transféra à son siège aux 8 rues du Prince Albert. Le 7 février 1945, il fut envoyé à Buchenwald et aboutit finalement, le 3 avril 1945, dans le terrible camp de Flossenbürg en Bavière où 73 296 personnes périrent.
Le 5 avril 1945, alors que les troupes alliées avaient déjà pénétré loin à l'intérieur du territoire germanique, Ernst Kaltenbrunner, le chef du Bureau central de la sécurité, ordonna à ses officiers de traduire devant une cour martiale quelques-uns des conjurés du 20 juillet 1944 non encore châtiés. À l'issue d'une audience expéditive, l'amiral Wilhelm Canaris, le général Hans Oster, le chef de la justice militaire Karl Sack, le capitaine Ludwig Gehre ainsi que Dietrich Bonhoeffer se virent condamner à mort, le 8 avril 1945, par le chef de bataillon SS Otto Thorbeck. Le lendemain, ils furent pendus et leurs dépouilles incinérées.
La résistance bourgeoise contre Hitler
Signalons encore dans le camp de la résistance bourgeoise, Hanna Solf veuve de l'ancien ambassadeur allemand à Tokyo. Son salon, où l'on prend le thé, est l'un des endroits où se retrouvent des opposants conservateurs à Hitler. Les relations de Hanna et de sa fille, la comtesse Ballestrem, leur permettent des interventions en faveur des persécutés. Les idées et l'éthique du cercle de Solf ont également inspiré la résistance active. C'est parce qu'il a tenté d'avertir Hanna Solf de la présence au sein de son cercle d'un espion de la Gestapo, que Helmuth von Moltke est arrêté fin 1943. Hanna Solf et la comtesse Ballestrem seront aussi internées, mais échapperont à la mort par suite d'atermoiements judiciaires. La pédagogue Elisabeth von Thadden, qui fréquente leur cercle, n'aura pas cette chance. Dans l'ensemble, la résistance politique des femmes ne se distingue pas de celle des hommes. Elles font simplement preuve d'une capacité plus grande à échapper à la Gestapo en conjuguant ruse et prudence. Mais il faut dire aussi que celle-ci s'en méfie moins, surtout au début.
Liselotte Hermann 1908-1938
Le régime craint que la répression envers les femmes n'éveille dans le public une compassion nuisible à la cohésion de la communauté du peuple. La première condamnation à mort d'une femme est celle de la jeune communiste Liselotte Hermann exécutée en 1938. Les nazis ouvrent néanmoins des lieux d'internements pour les femmes. Un premier camp de concentration est installé fin 1933 à Moringen, puis transféré en 1938 au château de Lichtenburg. Le camp de Ravensbrück est créé en 1939 et reçoit, jusqu'en 1945, 132 000 femmes (dont beaucoup d'étrangères). A partir de 1941, d'autres camps de concentration comme Auschwitz-Birkenau et Gross-Rosen ont des sections pour femmes.
Les témoins de Jéhovah contre Hitler
Dans la communauté singulièrement persécutée des témoins de Jéhovah, qui refusent de se plier pour des raisons religieuses aux injonctions du régime (pas de salut hitlérien, pas de participation aux organisations et aux services obligatoires, refus de porter les armes et de travailler pour la guerre), le rôle des femmes dans la résistance au nazisme est particulièrement important. Il est vrai qu'elles sont spécialement visées par le pouvoir qui s'efforce de détruire leurs foyers en cas de mariage mixte, les prive de leurs emplois et de leurs moyens de subsistance, leur retire la garde de leurs enfants.
Les femmes prennent une part très active dans la fabrication et la diffusion du bulletin Réveillez-vous et des tracts protestant contre le traitement infligé à leurs coreligionnaires. De 1935 à 1945, la proportion des femmes Témoins condamnées par le régime ne cesse de grandir pour atteindre les deux tiers.
À Ravensbrück, en 1939, une détenue sur trois est issue de cette communauté. Dans les camps, ces femmes se signalent par la fidélité à leur foi, par une dignité, une inflexibilité et une solidarité qui leur attirent l'admiration de leurs codétenues, voire l'estime des SS. Acceptant la détention comme une épreuve voulue par Dieu qui leur permet de poursuivre leur prosélytisme, elles s'interdisent de fuir et, de ce fait, sont souvent engagées par les SS comme employées de maison !
2000 femmes aryennes contre Hitler
Comment classer la démarche de 2,000 femmes aryennes qui, dans les jours qui suivent le déclenchement de l'Action finale concernant les juifs berlinois (il en reste alors à peu près 27000 dans la capitale, qui seront tous déportés), le 27 février 1943, se rassemblent devant le bâtiment de la Rosenstrasse, où est installé un camp de transit, pour protester contre la déportation de leurs parents juifs ou mi-juifs?
Leur obstination et leur cran face aux mitraillettes des SS sont récompensés. Elles retrouvent bientôt maris et enfants. Cet événement a en fait une grande signification politique. Il montre les limites de la dictature, qui est parfois obligée de reculer devant une protestation collective et publique résolue.
La résistance humanitaire est sans doute le domaine où les femmes donnent la mesure de leurs qualités et de leur courage. Elles sont nombreuses à s'y engager. Certaines mesures du régime, comme la décision d'euthanasier les malades mentaux incurables, les touchent au premier chef car elles concernent souvent un enfant. Elles ne peuvent rester insensibles aux flots des persécutés, notamment juifs, qui essaient d'échapper aux griffes nazies ou en subissent les abominables cruautés dans les prisons et les camps.
Il faut évoquer ici des personnalités comme la comtesse Maria von Maltzan qui sauve la vie d'un grand nombre de personnes, mais aussi beaucoup d'héroïnes anonymes telles Grete Borgmann, qui donne refuge à maints persécutés dans sa mansarde, Johanna Lehmann qui réussit à cacher des juifs pendant des années dans une maison de retraite berlinoise, la jeune Anneliese Biber qui passe médicaments et nourriture aux détenus de Dachau, etc.
LA VIE DES JUIFS EN ALLEMAGNE NAZIE
La vie des Juifs en Allemagne nazie
100 000 entreprises juives en 1933
Le boycottage des commerces juifs avait commencé quelques années avant l'avènement d'Hitler et s'était accentué entre 1929 et 1932 dans le chaos engendré par la crise économique. Les Juifs n'occupaient pas de positions clés dans l'économie mais la concentration de leurs activités dans quelques domaines, tels le marché du bétail (sur les 30000 marchands de bestiaux, plus de la moitié en 1930 étaient juifs), la confection (62% des détaillants de vêtements) et la chaussure, le commerce des métaux non ferreux (60% des entreprises) et les grands groupes de la distribution (quatre des cinq grandes chaînes de magasins appartenaient à des Juifs) les désignaient comme cible.
On comptait, en 1933, 100000 entreprises juives, mais parmi elles beaucoup plus de petits magasins (plus de 50 000 magasins juifs, mais seulement 5 % du total) et de PME que de grandes sociétés et banques privées. La grande crise n'avait pas épargné les Juifs. Beaucoup avaient perdu jusqu'à leurs retraites. On ne comptait que quelques centaines de familles juives dans la bourgeoisie. Elles n'étaient pas aux commandes de l'économie et le nombre des grandes entreprises juives diminuait, comme la proportion de la population juive. Par suite de l'émigration des jeunes, en 1925 on comptait en Allemagne 564 000 Juifs, en 1933 ils n'étaient plus que 525000. Jusqu'en 1929, le parti nazi ne fut qu'un groupe de pression des petits bourgeois insatisfaits. Mais, après 1929, il parvint à infiltrer les professions libérales, médecins et juristes.
Les lois de Nuremberg
Quand on passa aux confiscations pures et simples, le but avoué était de récompenser les anciens du parti national-socialiste pour les privations subies, en les gratifiants de biens ayant appartenu aux Juifs. Dès 1933, des milliers de fonctionnaires juifs limogés, les avocats juifs radiés du barreau, les médecins et dentistes juifs interdits de profession, sombrèrent dans la misère. Abraham Barkai cite des annonces de juges juifs qui vendent leur robe d'avocats, qui mettent leur étude à l'encan et d'entreprises cédées à des prix dérisoires. Mais les Juifs restés en Allemagne serrèrent les rangs, les mieux lotis fournissant travail et aide aux autres. Les plus riches parvinrent à faire sortir une partie de leurs liquidités d'Allemagne et l'on vécut des moments de répit trompeur parce que l'Allemagne connut encore du chômage jusqu'en 1936 et que les nazis craignaient un boycottage mondial des exportations allemandes par une internationale juive qui n'existait que dans leur propagande. Berlin signa avec un entrepreneur de Palestine l'accord de la Haavara (mot hébreux pour transfert adopté par la bureaucratie nazie) qui permit de transférer vers la terre de leurs ancêtres des milliers de Juifs et une partie de leurs capitaux reconvertis en équipements techniques allemands.
Hjalmar Horace Greeley Schacht 1877-1970
Le pas vers la coercition fut franchi au cours de l'été 1935 avec l'adoption par Hitler des lois de Nuremberg puis avec le limogeage, fin 1937, du ministre de l'Economie Hjalmar Schacht qui aurait tenté de protéger les Juifs. À l'automne 1935, on ne comptait déjà plus que 75000 entreprises juives en Allemagne. Certaines tentèrent de survivre en changeant de nom ou en confiant leur direction à des proches aryens opportunismes désapprouvés par la presse juive.
L’émigration forcée
Leopold Edler von Mildenstein1902-1968
En été 1935, après avoir effectué un voyage au Moyen-Orient, le SS Leopold Edler von Mildenstein crut avoir trouvé la solution idéale : les Juifs émigreraient en Palestine. Et comme les Juifs allemands ne sont pas tentés, il s'agit de les y pousser par l'intermédiaire des mouvements sionistes (rares) qui considèrent l'émigration en Palestine comme une solution d'avenir.
Mildenstein réussit à convaincre Himmler que son plan était réalisable. Alors fut créée, au sein du SD, une direction des affaires juives.
Adolf Eichmann 1906-1962
Pour l'aider dans sa tâche, Mildenstein fit appel à un jeune SS autrichien, nommé Adolf Eichmann, jusque-là confiné dans d'humbles emplois.
Cet ancien représentant de commerce né en 1906 à Solingen, incorporé au SD alors qu'il séjournait par hasard à Berlin, était avant tout discipliné et ambitieux. Pour lui tout chef SS était un être supérieur. Et il voulait à tout prix sa place au soleil. Bien que nullement antisémite il fréquentait même une jeune Juive il se mit, avec ardeur, à étudier les théories nazies antisémites, l'hébreu, le sionisme. Il entra en rapport avec des groupes sionistes et publia, en octobre 1936, un mémoire : l'Organisation mondiale sioniste. Il fit rapidement figure d'expert antisémite.
Herbert Martin Hagen 1913-1999
En 1937, Eichmann, devenu le chef du service Organisations sionistes, flt plus encore : il entra en relations avec Feivel Polkes, un Juif polonais émigré en Palestine, l'un des chefs de la Haganah, organisation juive d'autodéfense, qui fut invité à venir à Berlin. Le 26 février 1937, les deux hommes se rencontrèrent dans la capitale allemande et s'entendirent à merveille. Et le 2 octobre, Eichmann et l'Oberscharführer SS Hagen arrivent à Haïfa pour négocier une ébauche d'alliance avec la Haganah. Finalement Polkes accepta d'aider le SD par ses informations contre une somme mensuelle de quinze livres.
Satisfaits des services d'Eichmann, Himmler et Heydrich lui donnèrent de l'avancement. En 1938, il devint le chef de la Direction centrale pour l'émigration juive à Vienne.
C'est alors qu'Eichmann, enivré d'être devenu un chef, gonfla son service et s'entoura des futurs artisans du génocide.
Pour le moment, il voulait des résultats à tout prix. Puisque les Juifs mettaient de la mauvaise volonté à émigrer, on allait les y forcer.
Il y avait en Autriche 300 000 Juifs. Eichmann organisa l'émigration forcée de ces malheureux. Comme la plupart de ces hommes étaient très pauvres, les Juifs riches furent contraints de subvenir aux frais de voyage de leurs compatriotes dans le besoin. En outre, des organisations de secours juives vinrent en aide aux Juifs autrichiens. Au cours de l'été 1938, l'American Joint Distribution Committee versa 100 000 dollars en leur faveur.
Julius Streicher 1885-1946
En automne 1938, les services d'Eichmann avaient fait quitter l'Autriche à 45 000 Juifs.
Cette politique d'émigration des Juifs hors du IIIe Reich se heurta à l'opposition brutale des nazis fanatiques. C'est ainsi que, dans son journal antisémite, Julius Streicher demanda aux pays européens de fermer leurs frontières à l'immigration juive.
En octobre 1938, le gouvernement polonais déclara que les passeports des Juifs polonais vivant hors de ses frontières étaient périmés. Enchanté, le Führer saisit aussitôt cette occasion de se débarrasser des Juifs polonais vivant en Allemagne.
Le 28 octobre, Heydrich, chef de la police de sécurité, fit arrêter dix-sept mille de ces apatrides vivant dans le Troisième Reich.
Cette déportation fut la première de celles ordonnées par le régime nazi. Bien d'autres allaient suivre.
Ces milliers de Juifs furent entassés à bord de camions ou dans des wagons à bestiaux.
Joe J. Heydecker 1916-1997
De leurs biens, racontent Joe J. Heydecker et Johannes Leeb dans le Procès de Nuremberg, ils ne sont autorisés à emporter que ce qu'ils peuvent transporter eux-mêmes. Puis, les pitoyables colonnes sont mises en route vers l'est. Près de la gare-frontière de Benschen, on rassemble les malheureux dans les champs. Un ordre, et les policiers de Heydrich, formés en cordon serré, s'élancent pour les chasser devant eux, à coups de poing et de trique, en direction de la frontière. Des vieillards s'écroulent, se relèvent sous les bourrades, s'effondrent à nouveau pour mourir, le visage dans la terre humide.
Surpris par la brusque arrivée de cette marée humaine, les gardes-frontières polonais n'opposèrent aucune résistance à ces milliers d'hommes et de femmes. Ainsi, l'expulsion massive organisée par Heydrich réussit.
La vie des juifs dans le Troisième Reich
Les Jeux olympiques qui eurent lieu à Berlin en août 1936 donnèrent aux nazis une merveilleuse occasion d'impressionner le monde avec les réalisations du Troisième Reich, et ils en tirèrent le maximum. Les pancartes Juden unerwuenscht (Juifs indésirables) furent retirées sans fracas des magasins, des hôtels, des brasseries et des lieux publics, la persécution des Juifs temporairement arrêtée et le pays prit son aspect le plus sage.
Jamais encore on n'avait vu, dans des jeux précédents, une organisation aussi spectaculaire et un tel déploiement de réjouissances. Goering, Ribbentrop et Goebbels donnèrent des réceptions éblouissantes en l'honneur des visiteurs étrangers : la Nuit Italienne du ministre de la Propagande, sur le Pfaueninsel, près de Wansee, réunit plus de mille invités pour dîner dans un décor des Mille et Une Nuits. Les visiteurs, surtout ceux qui venaient d'Angleterre et d'Amérique, furent très impressionnés par ce qu'ils virent : un peuple apparemment heureux, sain, uni sous Hitler tableau très différent, dirent-ils, de celui que leur avaient peint les correspondants de leurs journaux à Berlin.
Et cependant, sous la surface, dissimulée aux touristes durant ces splendides journées de fin d'été des Jeux olympiques de Berlin, ignorée de la plupart des Allemands ou acceptée par eux avec une étonnante passivité, une transformation dégradante de la vie allemande semblait se produire aux yeux d'un étranger tout au moins.
Il n'y avait rien de caché, bien sûr, dans les lois décrétées par Hitler contre les Juifs, ni dans la persécution, inspirée par le gouvernement, de ce peuple infortuné. Les lois de Nuremberg du 15 septembre 1935 privaient les Juifs allemands de leurs droits civiques et les réduisaient au rang de sujets. Elles interdisaient également le mariage entre Juifs et Aryens, ainsi que les relations extra-maritales entre eux, et elles n'autorisaient pas les Juifs à employer des domestiques aryennes de moins de trente-cinq ans. En quelques années, treize décrets additionnels à ces lois de Nuremberg allaient mettre les Juifs complètement hors la loi. Mais déjà, dès l'été de 1936, quand l'Allemagne, hôtesse des Jeux olympiques, enchantait les visiteurs de l'Ouest, les Juifs avaient été exclus soit par la loi soit par la terreur nazie cette dernière précédant souvent la première des emplois tant publics que privés, dans une telle proportion que la moitié au moins d'entre eux se trouvaient sans moyens d'existence. Dans la première année du Troisième Reich, en 1933, ils avaient été exclus de toutes les fonctions officielles et publiques, du journalisme, de la radio, de l'agriculture, de l'enseignement, du théâtre, du cinéma; en 1934, on les mit à la porte de la Bourse, et, bien qu'ils ne durent être légalement bannis du barreau, de la médecine ou des affaires qu'en 1938, ils ne pouvaient pratiquement déjà plus pénétrer dans aucun de ces domaines à la fin des quatre premières années du régime nazi.
Qui plus est, on leur refusait non seulement la plupart des commodités de l'existence, mais souvent aussi le nécessaire. Dans plus d'une ville, il était difficile, sinon impossible, à un Juif d'acheter de quoi manger. Il y avait, sur les portes de l'épicier, du boucher, du boulanger et du crémier, des pancartes qui disaient : Interdit aux Juifs. Dans nombre d'agglomérations, les Juifs ne pouvaient même pas se procurer de lait pour leurs jeunes enfants. Les pharmaciens ne leur vendaient pas de médicaments. Les hôtels refusaient de les loger pour la nuit. Et partout, où qu'ils aillent, il y avait les pancartes injurieuses Cette ville est strictement interdite aux Juifs, ou Les Juifs entrent ici à leurs risques et périls. Sur une route près de Ludwigshafen, à l'entrée d'un virage brusque, il y avait ce panneau Attention! Virage dangereux! Juifs, 120 à l'heure.
Tel était le triste sort des Juifs vers l'époque où se tinrent en Allemagne les Jeux olympiques. Ce n'était que le début d'une route qui allait bientôt mener à leur extinction par le massacre.
L'héroïsme tout simple d'Heinrich List
En mai 1993, dans le musée de la synagogue de Michelstadt, petite ville thermale du Rhin-Main, les petits-enfants d'Heinrich et Maria List reçurent des mains de l'ambassadeur d'Israël en Allemagne, au nom de leurs grands-parents, la médaille des Justes parmi les peuples. Ceux-ci avaient accueilli au cours de l'hiver 1941-1942 Ferdinand Strauss, un juif. Un geste de simple humanité qu'Heinrich List avait payé de sa vie.
Fils d'un négociant en tissus de Michelstadt, Ferdinand Strauss avait fui chez une onde à Francfort après le pogrom du 9 novembre 1938, la Nuit de cristal. Mais en novembre 1941, quand la chasse aux juifs se fit plus dure encore son oncle étant décédé et sa tante s'étant empoisonnée, Ferdinand Strauss revint dans sa région natale, à Ernsbach. Quand il arriva chez les List, Maria était seule à la maison. Elle n'hésita pas. Lorsque son mari, Heinrich, revint des champs, il trouva Ferdinand Strauss, qu'il n'avait pas revu depuis l'avant-guerre, et fut immédiatement d'accord avec sa femme: Le juif reste chez nous. Et de fait, Ferdinand Strauss resta dans la ferme jusqu'au 16 mars 1942, date à laquelle la police vint arrêter Heinrich List. Un déporté polonais qui travaillait également dans la ferme avait parlé.
Strauss, lui, parvint à fuir à temps et survécut à la guerre. Heinrich List fut interrogé par un simple policier à qui il déclara: J'admets que depuis la mi-novembre jusqu'à il y a huit jours, j'ai caché le juif Ferdinand Strauss. J'étais le jour dit aux champs. Ma femme était à la maison et l'a accueilli. Je lui ai demandé ce qu'il comptait faire, il m'a dit qu'il voulait rester quelques jours à Ernsbach. À la question du policier sur les raisons qui l'avaient poussé à accueillir Ferdinand Strauss, le paysan répondit simplement: Parce que nous nous connaissons depuis l'enfance et qu'il était tout seul. N'avait-il pas agi par hostilité au Reich ? Insista le policier: Non! Seulement parce que nous nous connaissions bien.
Comment le Polonais avait-il pu donner autant de détails sur le juif? Questionna enfin le policier : Mon ouvrier polonais et le juif ont mangé tous deux à notre table. Le juif prenait part à toute la vie de famille. La Gestapo plaça alors Heinrich List en détention préventive puis le déporta à Dachau. C'était en mars 1942, deux mois après la conférence du Wannsee. En octobre, le commandant de Dachau informa Maria List que son mari était décédé d'un phlegmon à la jambe et qu'il n'y avait pas d'inconvénient à ce qu'elle vienne chercher l'urne avec les cendres.
7000 juifs danois sauvés
Georg Ferdinand Duckwitz était, lui, un diplomate. Étudiant en droit, il était entré au parti nazi avant 1933. Connaissant bien le Danemark où, avant guerre, il avait été le représentant de la firme de Brême Kaffee HAG, il y avait été nommé par Ribbentrop responsable des questions maritimes à la mission d'Allemagne, un poste qui lui permit de sauver 7 000 juifs danois. En août 1943, le Danemark est sous la coupe du général SS Werner Best, qui avait fait ses classes chez Heydrich. Pour se ménager les bonnes grâces du Führer, Werner Best propose dans un télégramme adressé à Berlin de faire déporter dans un camp d'extermination de Pologne 8000 juifs danois. Dans son télégramme, il précise cependant qu'il a des problèmes de logistique et qu'il faut lui envoyer des renforts pour organiser une telle opération.
Pendant ce temps, à Copenhague, où il compte de nombreux amis, Duckwitz prend contact avec la Résistance danoise. Il se rend même à Berlin pour tenter d'intercepter le télégramme avant qu'il parvienne au quartier général du Führer. Trop tard ! Le 17 septembre, la réponse d'Hitler arrive: la déportation est approuvée. Le soir du 19 septembre 1943, Georg Duckwitz note dans son journal: Je sais ce que j'ai à faire. Il se rend à Stockholm et informe le Premier ministre suédois Per Albin Hansson, lui demandant d'intervenir auprès de Berlin. Une intervention sans effet.
Duckwitz tente alors d'empêcher la déportation par l'intermédiaire d'amis allemands haut placés. Peine perdue. Il prend ensuite le risque de parler à Werner Best. Tout général SS qu'il est Werner Best est lucide.
Depuis la défaite des armées allemandes devant Stalingrad, il a senti le vent tourner et est soucieux de survivre au IIIe Reich dont il pressent que les mois sont comptés. Le SS assure à Duckwitz qu'en cas de départ illégal des juifs, il n'aurait pas les moyens de les en empêcher. Duckwitz obtient alors le concours de Friedrich Wilhelm Lübke, chef des transports maritimes à Aarhus. Celui-ci prétexte que ses navires sont en mauvais état et qu'il faut faire venir deux bateaux de Pologne pour transporter les juifs. Duckwitz utilise ce répit pour monter une opération avec la Résistance et l'influent parti social-démocrate danois trois futurs ministres-présidents du Danemark participent aux entretiens secrets. Une action d'envergure est mise sur pied. Il s'agit rien moins que de procéder à l'exfiltration des milliers de juifs danois.
Le diplomate allemand a même envoyé un émissaire à Stockholm pour prévenir les autorités suédoises de l'opération afin qu'elles se préparent à accueillir toutes ces personnes. Informé par les résistants, le rabbin Markus Melchior prévient à son tour ses fidèles; ils doivent passer dans la clandestinité et se préparer au départ. L'évêque de Copenhague, Hans Fuglsand-Damgaard, proteste auprès des autorités allemandes contre la persécution des juifs et fait lire en chaire dans toutes les églises du pays une déclaration hostile aux mesures allemandes.
Des dizaines de bateaux de pêcheurs danois et de petites embarcations se relaient alors et prennent la mer. À leur bord, plus de 7 000 personnes, vieillards, hommes, femmes et enfants voguant vers la Suède. Curieusement, la marine allemande ne remarque rien : te commandant du port est un ancien collègue et ami de Duckwitz. Et des amis, le diplomate allemand n'en manque pas. Ils lui permettent même d'échapper à la Gestapo. Quand il revint en 1955 à Copenhague comme ambassadeur de la République fédérale, il fut reçu en ami par les plus hautes autorités du pays.
Berthold Beitz sauvé des Juifs au péril de sa vie
Un autre Allemand, dont l'action en faveur des juifs persécutés sous le régime hitlérien est peu connue hors d'Allemagne, s'appelle Berthold Beitz. Après la guerre, il devint directeur général des assurances Iduna à Hambourg, puis à partir de 1953, pendant plus de vingt ans, fondé de pouvoir de Krupp. Berthold Beitz, garçon d'origine modeste, fils d'un sous-officier des Uhlans, était devenu secrétaire de la filiale de la Reichsbank à Demnin en Poméranie. À 28 ans, en 1941, brillant économiste, il fut nommé directeur de la compagnie pétrolière Beskiden-Ol, ancienne filiale de la Shell.
Il avait sous ses ordres 1500 ouvriers, pour la plupart juifs. Son seul souci quand il arriva à son poste, était de faire carrière. À Borislav, en Galicie, le 15 février 1943, le Responsable des juifs et des camps de travail de l'état-major des SS, Friedrich Hildebrand, déclenche une opération d'extermination contre les ouvriers juifs parqués dans un ghetto, faisant abattre sur-le-champ tous les jeunes enfants, enfermant les autres dans le Collosseum, un cinéma. L'un d'eux, Aleksander Hauer, qui travaille avec Beitz, parvient à s'enfuir et alerte son patron. Beitz se rend aussitôt en voiture au Collosseum et obtient de la police la remise en liberté de quelques personnes, des proches parents de ses collaborateurs.
Les 600 autres prisonniers sont embarqués sur des camions et conduits aux abattoirs de la ville pour y être fusillés. Beitz suit les camions et, à quelques dizaines de mètres du lieu de l'exécution, parvient encore à faire stopper le convoi et à obtenir que la femme de ménage de son bureau, Lorka Altbach, en descende, affirmant qu'il s'agit de sa secrétaire. Mais il ne peut éviter le massacre auquel il assiste impuissant. Josef Gabriel, le responsable des juifs à la Sicherheitspolizei, commande les policiers ivres qui procèdent aux exécutions. Un grand nombre des victimes, seulement blessées par les tueurs, sont enterrées vivantes. Des soldats, des civils, des policiers, des SS, des Ukrainiens et des Polonais assistent également à la boucherie. Sans intervenir.
La secrétaire de Berthold Beitz, Hilde Berger-Olsen, a raconté plus tard que celui-ci rentra au bureau pâle comme la mort, disant qu'un jour, le monde entier apprendrait que de telles choses s'étaient passées et que le peuple allemand tout entier paierait pour ces crimes. Berthold Beitz avait changé de camp. Très forte personnalité et, au physique comme au moral, copie conforme de l'idée que se faisaient les nazis du capitaine d'industrie germanique, il consacra son temps, avec le soutien de sa famille et de ses amis, à sauver des juifs au péril de sa vie. Ce n'était pas par antifascisme, ni un acte de résistance, dit-il par la suite. C'était tout simplement qu'il fallait se comporter comme un être humain. En juillet 1943, Beitz était encore le seul chef d'entreprise des Pétroles des Carpates à n'avoir pas donné un seul juif, donné signifiant la mort. Il géra aussi son groupe d'entreprises de manière à pouvoir y maintenir le plus grand nombre possible de juifs déclarés indispensables à l'industrie de guerre. En 1944, Beitz fut mobilisé dans la Wehrmacht. Ce qui le sauva peut- être de la Gestapo.
GRANDIR EN ALLEMAGNE NAZIE
Le coup de poignard dans le dos
Que se passa-t-il pendant l'enfance de cette génération de la classe moyenne allemande qui fit d'elle une telle source de pouvoir pour les maîtres du Ille Reich ? J'incriminerais surtout l'atmosphère sombre des lendemains de la première guerre mondiale. Nos parents se plaignaient sans cesse de l'appauvrissement croissant de l'Allemagne. A peu près constamment, nous voyions des individus en loques venir implorer à notre porte une assiette de soupe. La vue d'invalides de guerre, amputés ou aveugles, qui mendiaient aux carrefours nous effrayait souvent. Nous entendions toujours les adultes parler de tel ou tel de leurs amis qui avait perdu son emploi et ne savait plus comment faire vivre sa famille. On comptait à la fin six millions de chômeurs.
De plus, mes parents imputaient tout cela aux réparations que l'Allemagne devait payer à ses anciens adversaires, ainsi qu'à la perte des zones industrielles allemandes. On ne parlait pas, en revanche, des conséquences de la grande crise économique qui était durement ressentie partout, et pas seulement en Allemagne, au début des années 1930. Tous nos maux venaient du désastre national de Versailles.
Longtemps avant que nous comprenions vraiment ce que signifiait la guerre nous savions qu'il s'agissait de quelque chose d'horrible. Et quand les adultes en parlaient, c'était pour répéter que sa conclusion et ses conséquences constituaient une monstrueuse injustice. Ils disaient : L'Allemagne a perdu la guerre, bien qu'aucun pays n'ait eu de soldats plus courageux que les siens. Elle n'a pas été battue sur le terrain, mais poignardée dans le dos par les crapules qui la gouvernent à présent.
L’influence des Juifs
Selon mes parents, l'Allemagne était gouvernée depuis 1918 par ceux-là mêmes qui l'avaient trahie. Partout nous entendions les gens protester contre les jeux confus des partis politiques. Tous enfants que nous fussions, nous sentions à quel point ces partis maudits empoisonnaient l'atmosphère. J'avais douze ans lorsque je me trouvai prise dans un combat de rue, entre communistes et nationaux-socialistes. Quand je repense à cette époque, il me semble que ma mère lisait chaque matin dans le journal la nouvelle d'un assassinat politique.
On entendait sans cesse répéter que l'une des raisons de ce triste état de choses était l'influence grandissante des juifs. Quand j'étais entrée à dix ans au lycée, le tiers de mes camarades étaient des juives et je les traitais exactement comme les autres. Mes parents fréquentaient des collègues juifs de mon père et l'excellent vieux M. Lévy, qui occupait l'appartement au-dessous du nôtre, était un ami. Mais tout cela n'empêcha pas mes parents d'être antisémites, encore qu'ils se refusassent à l'idée de mesures de rétorsion brutales à l'égard des juifs. Les adultes nous enseignèrent que les juifs étaient mauvais, qu'ils faisaient cause commune avec les ennemis de l'Allemagne, etc. Pour nous, le juif faisait donc figure d'épouvantail. Nous n'aurions jamais pensé identifier à ce juif nos camarades d'école israélites ou le vieux M. Lévy. Cette confusion mentale me permit, par la suite, de me conduire et de penser en antisémite, sans me rendre compte de ce que cela avait d'inhumain. Je haïssais un épouvantail et non pas des êtres humains.
Adhésion aux jeunesses Hitleriennes
Nous étions donc prêts pour devenir des nazis enthousiastes. Le national-socialisme combla nos aspirations. Pour moi, il fortifia mon opposition à ma famille, conservatrice et bourgeoise. Ma mère exigeait de ses enfants la même obéissance que de ses domestiques. Cela m'incita, dès mon enfance, à me solidariser avec les classes opprimées. L'idée d’Hitler d'une association de toute la nation me fascinait. J'imaginais que cela ferait de ce monde un paradis où toutes les classes vivraient ensemble comme les membres d'une même famille. Je ne pensais pas alors que quantité de gens seraient exclus de ce paradis les juifs, les socialistes, les infirmes de naissance.
En mars 1933, et contre le voeux de mes parents, j'adhérai secrètement à la Hitler Jugend (Jeunesse hitlérienne). Nous vivions enfin délivrés de l'éternelle tutelle des adultes. Nous étions tous des jeunes responsables de nos actes. Je devins journaliste, chargée de rendre compte dans la presse locale des activités de notre groupe.
J'eus le sentiment de participer à l'édification de l'Allemagne nationale-socialiste. Mes parents cessèrent peu à peu de s'opposer à ma présence au sein de la H. J. : la réussite d’Hitler commençait à modifier leur opinion. Le nombre des chômeurs diminuait. Tout le monde pouvait constater qu’Hitler avait rétabli l'ordre. Il nous débarrassait de la clique juive de la République de Weimar. Il avait quitté la méprisable S.D.N, repris la Sarre, etc.
La jeunesse allemande
Les Allemands commençaient à relever la tête ! L'Allemagne n'était plus un jouet entre les mains de ses ennemis. Aux Jeux olympiques de Berlin, en 1936, la jeunesse allemande rencontra des jeunes gens de tous les pays. Désormais sur un pied d'égalité, nous accueillirent fort bien ces enfants de nos ennemis héréditaires. Nous souhaitions alors un avenir de paix et d'estime mutuelle.
Entre-temps je continuais mes études tout en consacrant à la H. J. tous mes instants de liberté. La vision d'un plus grand empire allemand m'obsédait. Il fallait jadis des générations pour édifier un empire. Nous voulions construire le nôtre en un clin d'oeil. Je ne m'accordais donc pas un instant de repos.
Après mon examen de fin d'études, je fus envoyée pour mon temps de service civil dans un camp de Prusse-Orientale. Cette période fut la plus insouciante de ma vie. Pour la moisson, nous travaillâmes plus de quinze heures par jour. J'étais parfois si fatiguée que je tenais à peine debout. Mais j'étais heureuse parce que je me sentais utile. Il y avait parmi nous des paysannes, des étudiantes, des coiffeuses, des domestiques, des employées. L'entente qui régnait dans notre camp constituait un parfait modèle réduit du rassemblement du peuple allemand d’Hitler. Je croyais que l'ambiance de ce camp annonçait celle du monde de l'avenir.
La nuit de cristal
Après mon service civil, je devins responsable à plein temps des organisations de jeunesse. J'étais heureuse de n'avoir plus à sacrifier la H. J. à ma scolarité. Pendant les deux ans qui précédèrent la guerre, la réalisation de nos rêves : l'édification d'une Allemagne impériale, nous parut à portée de la main. Le retour dans le sein de la mère patrie de l'Autriche et des Sudètes nous fit déborder d'enthousiasme.
La nuit du 9 au 10 novembre 1938, la Nuit de cristal, mit une ombre sur notre joie. Des atrocités de la nuit, je ne vis rien, mais, au matin, je constatai le saccage des petites boutiques et des restaurants modestes tenus par des juifs près de l'Alexanderplatz à Berlin. Ces traces de violence m'horrifièrent. Mais ne nous avait-on pas constamment répété que la juiverie internationale excitait le monde contre l'Allemagne ? A présent, les juifs s'étaient vu infliger un sévère avertissement.
Je chassai aussi vite que je pus de mon esprit le souvenir de cette manifestation, qui n'avait pourtant frappé que des innocents ces petites gens dont on avait dévasté les modestes boutiques avaient-ils quelque chose de commun avec le capitalisme juif international ? Il était plus simple de n'y plus penser et de se remettre rapidement au travaille.
Discourt à Nuremberg
Le IXe congrès de Nuremberg de l’automne 1938 s’était placé sous le signe du Reich de la Grande-Allemagne et, sans aucun doute, constitua le plus grandiose, le plus imposant, le plus colossal et le plus menaçant de tous les grands rassemblements de foules qu’ait jamais eu pour théâtre l’Allemagne national-socialiste.
Rien ne bougeait, rien ne vivait, rien n’existait, hormis ce ciel enflammé, cette nuit inhumaine, intemporelle et le face à face de cet homme avec cette foule, le pullulement des dignitaires massés sur les gradins, la mer des spectateurs par dizaines de milliers surplombant l’océan de casques d’acier, la houle des armes, l’alignement des rangées d’étendards, l’immobile coulée d’un bloc de cent mille, de deux cent mille, de trois cent mille recrues et vétérans statufiés.
Dans une atmosphère survoltée, le lundi 12 septembre, Hitler entra au crépuscule dans la ville et de là, gagna le Pré du Zeppelin pour y prononcer le discours de clôture. Tout avait été conçu, agencé, ordonné, pour conférer à l’ultime soirée l’harmonie sauvage d’un événement dramatisé au maximum, attendu et appréhendé dans une nervosité croissante et inquiète par la plupart des grandes capitales étrangères.